Rétrospective 2007 sur le logiciel libre et les sujets afférents

  1. Édito
  2. Quatre saisons de formats ouverts et d'interopérabilité
  3. Communautés
  4. Logiciel libre et politique publique
    1. Les députés sous GNU/Linux
    2. Le Logiciel Libre fait son entrée dans les pôles de compétitivité
    3. Un guide pour aider les administrations à utiliser des logiciels libres
  5. Collectivités publiques
    1. Une mention Libre pour les Villes Internet
    2. Adhésion de la première collectivité à l'April : Pierrefitte-sur-Seine
    3. Le Référentiel général d'interopérabilité (RGI) en suspens
  6. Entreprises
  7. DRM et informatique déloyale
  8. DADVSI
    1. Parution du décret d'application au sujet des outils de contournement
    2. Le décret attaqué par l'April au Conseil d'État
    3. Mission Olivennes, rapport, accord
  9. Ventes liées
  10. Brevets sur les logiciels
  11. OOXML, la suite du feuilleton
  12. Éducation
  13. Matériel
  14. Les nouvelles versions des licences GNU GPL, LGPL, et AGPL
  15. Contributeurs

Édito

L'année 2007 fut une année de progrès importants pour le Logiciel Libre.

D'une part, avec des événements marquants comme la migration de l'Assemblée nationale, qui montre la viabilité des systèmes GNU/Linux sur le poste de travail. Soulignons également la décision de la Cour Européenne, qui condamne les abus de position dominante de Microsoft et consacre l'interopérabilité comme condition de la libre concurrence. On peut enfin noter la prise de conscience de la classe politique française : huit candidats à l'élection présidentielle sur douze ont répondu au questionnaire de l'initiative Candidats.fr, et soixante-huit députés ont signé le Pacte du Logiciel Libre.

D'autre part, les administrations sont toujours plus nombreuses, en particulier en Europe, à utiliser des logiciels libres pour Internet, la bureautique, ou des applications spécifiques. Le marché du Logiciel Libre, particulièrement dynamique, poursuit sa forte croissance. Quant à la communauté, elle a montré une vivacité toute particulière aux Rencontres mondiales du logiciel libre à Amiens qui ont connu une fréquentation record.

Forts de ces avancées, nous avons trois défis majeurs à relever en 2008.

Il nous faut tout d'abord mettre un terme au scandale de la vente liée, pour rendre aux consommateurs leur liberté de choix et permettre à une concurrence de s'instaurer sur le marché des logiciels grand public, et plus particulièrement des systèmes d'exploitation. L'April est très investie sur ce dossier où elle intervient de concert avec le groupe de travail Détaxe et les associations de défense des consommateurs.

Nous devrons également faire preuve d'une grande vigilance lors de la tentative de mise en oeuvre des accords Olivennes dans notre législation. Nous devrons faire de ces débats une occasion de revenir sur la loi DADVSI et ses effets néfastes sur le Logiciel Libre, tout en veillant à ce que des dispositions discriminatoires telles que le filtrage protocolaire soient rejetées. L'April sera bien entendu présente auprès de tous les acteurs (internautes, parlementaires...) comme elle l'a été lors de la loi DADVSI.

Enfin, ce sera l'année de la mise en oeuvre du Référentiel Général d'Interopérabilité (RGI) dans les administrations de l'État. Pour soutenir son application dans les collectivités locales, l'April interviendra auprès des élus locaux. Elle renouvelle cette année l'initiative Candidats.fr à l'occasion des élections municipales de mars 2008 : elle sensibilisera les candidats et leur demandera de prendre position comme elle l'avait fait lors des campagnes présidentielle et législative de 2007. L'utilisation de logiciels libres et de standards ouverts dans les collectivités locales sera un thème majeur de cette campagne. L'April continuera par ailleurs de prendre toute sa part aux discussions de l'AFNOR relatives à la normalisation ISO du format OOXML, concurrent d'ODF.

Un dernier mot sur l'international : ne baissons pas la garde sur le brevet européen, qui est toujours en suspens. La présidence française de l'Union européenne, à l'été 2008, sera l'occasion pour chacune et chacun d'entre nous de manifester notre volonté de défendre le Logiciel Libre et faire rejeter, comme en 2005, les tentatives de légalisation des brevets logiciels.

L'April vous remercie de votre soutien, et vous donne rendez-vous pour tous les événements et actions qui rythmeront l'année 2008 du Logiciel Libre.

Librement, Benoît Sibaud, Président de l'April.

Quatre saisons de formats ouverts et d'interopérabilité

En 2006, nous écrivions 'il faudra malheureusement attendre l'année 2007 pour obtenir la signature du RGI' (Référentiel Général d'Interopérabilité). Un an après, ce document est toujours coincé dans un parapheur. Les utilisateurs, aux prises avec leurs difficultés quotidiennes pour échanger, archiver ou modifier des données prisonnières dans des fichiers aux formats fermés, n'ont donc pas fini de perdre leur temps. Plusieurs projets sont suspendus car les responsables informatiques préconisent avec raison d'attendre la publication du RGI pour faire des choix stratégiques. Le 1er avril 2007, les associations du libre révèlent les raisons du blocage du Référentiel Général d'Interopérabilité.

En février Microsoft propose un greffon ODF pour son traitement de texte propriétaire Word et publie une lettre ouverte intitulée Interopérabilité, Choix et Open XML. Le 15 juin, Microsoft écrit 'Le choix - Les utilisateurs auront à décider du format de leur document'. La confrontation entre le format ouvert OpenDocument, reconnu par l'ISO, et le format OOXML poussé par Microsoft, se poursuit avec virulence et sans trêve estivale. L'AFNOR (organisme officiel français de normalisation) propose de couper le format OOXML en deux et l'ISO refuse d'en faire un standard officiel mais cela n'aura pas pour effet de sabrer Microsoft qui semble bien déterminé à poursuivre. Nous revenons sur cette bataille un peu plus loin dans cette rétrospective.

En mars, le Danemark rend obligatoires les standards ouverts mais la bataille va faire rage en public ou dans les coulisses pour définir ce qu'est un standard ouvert. Une directive du Ministère de la défense publiée au journal officiel préconise de 'favoriser l'interopérabilité par un recours aux standards, protocoles et formats d'échanges ouverts'. En juillet, l'IDABC, corps de l'Union Européenne traitant de l'interopérabilité entre e-Gouvernements, a émis un document portant sur l'interopérabilité et l'emploi de formats ouverts en Europe annonçant clairement que les formats fermés, appelés pudiquement 'autres formats', sont tout à fait acceptables. Un appel est lancé pour mobiliser la communauté. En octobre, Thierry Stoehr écrit L'Europe ne veut pas de standard ouvert pour l'interopérabilité. Comme Microsoft. La Commission européenne annonce victorieusement avoir trouvé un accord avec Microsoft en matière d'interopérabilité, mais cette nouvelle ne suffit pas à endormir la vigilance de l'April. APITUX complète sa série Des formats ouverts pour des données libres avec un article consacré a Jabber : la messagerie instantanée libre et bien plus encore. L'April invite Nicolas Vérité pour une causerie intitulée Jabber, les enjeux, et pourquoi la communauté du libre devrait Jabberiser. En décembre, le Gouvernement des Pays-Bas opte pour les formats ouverts afin de diminuer la dépendance envers les fournisseurs de Technologies d'Information et de Communication, mais encore une fois se pose la question de la définition d'un format ouvert. Le gouvernement norvégien lui est plus précis lorsqu'il décide que toutes les informations disponibles sur ses sites Web officiels devraient être accessibles dans les formats ouverts de documents HTML, PDF ou ODF. Enfin, quelques jours avant Noël, le projet Samba signe un accord avec Microsoft afin d'obtenir les spécifications et la liste des brevets qui couvrent le protocole SMB/CIFS. Andrew Tridgell, fondateur de Samba, déclare que l'accord lui permettra 'de se tenir à jour sur les récents changements de Microsoft Windows, et également d'aider d'autres projets de logiciels libres'.

Communautés

Durant cette année 2007, la communauté du Logiciel Libre a une nouvelle fois montré son dynamisme au travers des nombreux évènements qu'elle a organisé pour promouvoir et démocratiser les Logiciels Libres auprès du plus large public.

L'Agenda du Libre, lancé en juin 2005, est un indicateur de la vivacité de la communauté du Libre en France. Un peu moins de deux ans après sa création, l'Agenda passait le cap des 1000 évènements référencés et dépassait les 1400 éléments à la fin de l'année. Au total, en 2007, 662 évènements ont été organisés, en hausse de près de 150 évènements par rapport à l'année précédente. Cette année, les villes les plus actives ont été Rennes (95 évènements), Paris (83 évènements), Toulouse (46 évènements) et Lille (40 évènements).

À coté de ces évènements locaux, des manifestations d'ampleur nationale et internationale ont également marqué cette année 2007.

Début février, le salon Solutions Linux 2007 a permis aux entreprises de présenter leurs solutions liées à GNU/Linux aux 10.000 visiteurs. Le village associatif, fort de 50 associations, était doté pour la deuxième année consécutive d'un espace de conférences, accessibles librement. Ce salon, dont le village associatif permet d'exposer la face communautaire du Logiciel Libre aux cotés des professionnels, reste sans conteste le rendez-vous français majeur du début de l'année. En 2008, Solutions Linux aura lieu les 29, 30 et 31 janvier au CNIT, Paris La Défense.

Fin février, le Free and Open Source European Developer Meeting (FOSDEM) était organisé comme chaque année à Bruxelles. Il a rassemblé plusieurs milliers de personnes, venues assister aux conférences principalement techniques animées par des personnalités importantes du monde du Logiciel Libre, avec notamment Jim Gettys du projet One Laptop Per Child, Peter Saint André de Jabber, Miguel de Icaza du projet Mono, Jeremy Allison du projet Samba, Simon Phipps de Sun et Andrew Morton du noyau Linux. L'équipe d'organisation de l'évènement avait d'ailleurs publié plusieurs interviews d'orateurs du FOSDEM. Suite à l'évènement, les vidéos des différentes interventions ont été mises en ligne, permettant à tous ceux n'ayant pu se rendre sur place d'y assister en différé. En 2008, l'évènement aura lieu les 23 et 24 février à Bruxelles.

Pour la deuxième année consécutive a eu lieu à Paris l'évènement Paris Capitale du Libre les 13 et 14 juin, avec conférences, stands, plénières, et la remise de Lutèce d'Or dans différentes catégories. On notera particulièrement la remise du prix « Lutèce de la personnalité de l'année » à l'Assemblée Nationale, pour la migration des postes des députés vers le système d'exploitation libre Ubuntu GNU/Linux.

Au mois de mars a eu lieu pour la sixième année consécutive l'initiative Libre en Fête, lancée en 2001 par l'April. Cette initiative consiste à inviter toutes les associations de promotion du logiciel libre et les lieux publics d'accès à Internet et d'organiser des évènements de découverte des Logiciels Libres pour accompagner l'arrivée du printemps, dans une dynamique conviviale et festive. L'édition 2007, coordonnée par Pascal Desroche, a été un succès : près de 100 évènements se sont déroulés dans 17 régions françaises, avec une bonne couverture par la presse avec un article dans le journal Le Monde. L'initiative est relancée pour l'année 2008, autour du 21 mars.

Début juillet, la 8ème édition des Rencontres Mondiales du Logiciel Libre s'est tenue à Amiens, organisée par l'Epplug et CLX, avec la participation de l'ABUL, de l'AFUL et de l'April. Comme chaque année, plusieurs centaines de conférences et ateliers ont été organisés sur quatre jours dans des thèmes variés, techniques ou non : «Économie publique», «Le libre au-delà du logiciel», «Entreprises», «Sciences, recherche et médecine», «Système», «Développeurs», «Éducation, éducation populaire», «Documentation, traductions, internationalisation», «Création numérique, multimédia» et «Communautés». Des personnalités de la communauté du Libre, comme Samuel Hocevar (leader du projet Debian) ou Alan Cox (développeur du noyau Linux), étaient présentes pour donner des conférences. Ces huitièmes rencontres se sont révélées être un important succès, puisqu'environ 3000 visiteurs ont fait le déplacement à Amiens pour cet évènement. De nombreuses conférences ont été filmées et sont visibles en vidéo. La 9ème édition des RMLL aura lieu du 1er au 5 juillet 2008 dans la ville de Mont de Marsan dans les Landes, et l'appel à contribution est déjà lancé.

Fin novembre, la 3ème édition des Rencontres Africaines du Logiciel Libre, dont le thème était Logiciel Libre et éducation, s'est déroulée à Rabbat au Maroc. C'est à cette occasion qu'aura été remis le prix trophée du Libre. Ces rencontres ont eu lieu avec le soutien de l'Association Africaine des Utilisateurs de logiciels Libres et l'Organisation Internationale de la Francophonie.

En plus de ces évènements au rayonnement national ou international ont eu lieu d'autres évènements à portée régionale. Comme chaque année, les Journées du Libre à Montpellier, la Journée méditerranéenne des logiciels libres, les Journées du Logiciel Libre à Lyon ont été organisées. De nouveaux évènements ont également fait leur apparition : un salon professionnel des Logiciels Libres à Marseille, Libres Clics à Auch, les Journées du Libre à Caen, les Journées du Libre en Touraine ou Aquitaine Libre à Brocas. De plus, ces évènements généralistes souvent orientés vers le grand public étaient aussi accompagnés d'évènements plus spécialisés, comme les Journées Perl, un DevCamp Debian, la conférence Paris on Rails ou la conférence SugarCRM.

L'April a lancé l'initiative candidats.fr. Pour les présidentielles, sur 12 candidats 8 ont répondu à un questionnaire proposé par l'April et 7 d'entre eux se sont prononcés sur des propositions formulées par l'April. Lors des élections législatives, 615 volontaires de la communauté ont entrepris 1225 actions de contact auprès des candidats à la législature. Il en a résulté 520 signatures du pacte du logiciel Libre proposé par l'April. Parmi ces 520 députés signataires, 68 ont été élus.

L'année 2008 aura vu apparaître plusieurs nouveaux Groupes d'Utilisateurs de Logiciels Libres (GULL), dont ILARD (Informatique Libre en Ardennes), Spartanux (à Eparnay) et Linux Saint-Malo. Les GULL de la communauté francophone en Belgique ont relancé l'initiative d'un InterLUG belge francophone.

Du coté des prix, la Fondation pour le Logiciel Libre a remis son prix à Théodore Ts'o pour son travail sur Kerberos. Les Trophées du Libre, dont le jury était cette année présidé par Georg Greve, président de la FSF Europe, ont été remis le 29 novembre à 18 projets répartis dans 6 catégories (sécurité, logiciels d'entreprise, administration et collectivités, logiciels éducatifs, multimédia et jeux, logiciels scientifiques).

Logiciel libre et politique publique

Les députés sous GNU/Linux

Suite à l'étude menée par Atos Origin à l'automne 2006, les Questeurs de la XIIème législature et le Président de l'Assemblée nationale Jean-Louis Debré ont décidé que les postes des députés de la XIIIème législature seraient équipés d'un système d'exploitation et de logiciels libres. Ce choix a été fait au regard de nombreux éléments, en prenant notamment en compte le coût de l'incontournable passage à Vista si les postes étaient équipés du système d'exploitation de Microsoft. L'étude a notamment montré que « les solutions offrent des fonctionnalités adaptées aux besoins des députés et permettront de réaliser de substantielles économies en dépit de certains coûts de mise en oeuvre et de formation. ». Lire le communiqué de presse de l'Assemblée nationale

Ce choix a été salué par l'ensemble de la communauté, et récompensé lors de l'édition 2007 de Paris Capitale du Libre par le Lutèce d'Or de la personnalité de l'année. Lire le communiqué de l'April et le discours de Frédéric Couchet, délégué général de l'association.

Le Logiciel Libre fait son entrée dans les pôles de compétitivité

Quelques semaines après la publication en 2006 du rapport « À armes égales » de Bernard Carayon, qui prônait une politique industrielle pour le Logiciel Libre, le ministre de l'Économie et des Finances de l'époque, Thierry Breton, a plaidé pour un pôle de compétitivité Logiciel Libre : « Compte tenu de l'importance majeure de l'industrie du logiciel dans l'économie de l'immatériel, et du dynamisme de notre recherche, des entreprises et des communautés françaises du logiciel libre, je souhaite que ces talents et ces compétences se fédèrent dans le cadre d'un pôle de compétitivité du logiciel libre et de l''open source'. Mes équipes ont déjà entrepris de demander aux acteurs de se mobiliser en ce sens, le travail avance bien, et je souhaite un aboutissement et une labellisation rapides. » (Source : discours de Thierry Breton à l'occasion de la publication du Rapport Lévy/Jouyet sur l'Économie de l'Immatériel)

Pour l'heure, le projet de pôle a été adossé à System@tic, pôle de compétitivité sur les logiciels basé en Île-de-France, via un groupe de travail nommé « Ouverture ». Il a « pour vocation de traiter des sujets de R&D spécifiques au Logiciel Libre, contribuer à la structuration et au développement de l'offre en Logiciel Libre et enfin accompagner l'organisation de l'innovation ascendante en logiciel », annonce le communiqué du pôle System@tic Paris-Région. Le groupe indique en outre qu'il « s'appuiera sur la communauté du Logiciel Libre francilien, caractérisée par la diversité de ses acteurs : individus, associations, PME, mais aussi grands groupes industriels et universités. Il s'agit en outre de promouvoir l'émergence d'une industrie prospère du Logiciel Libre, en contact étroit avec le monde de l'enseignement et de la recherche, afin de favoriser le développement de logiciels libres innovants, capitalisant sur les avancées scientifiques de la région Île-de-France. »

La démarche pourrait bien inspirer d'autres pôles, et essaimer dans divers domaines de compétences, et sur divers territoires. Cela permettrait de s'approcher de la conception recommandée dans le rapport « À armes égales », qui préconise un méta-pôle constitué de clusters répartis sur l'ensemble du territoire français.

Voir également la page de l'April dédiée au pôle de compétitivité.

Un guide pour aider les administrations à utiliser des logiciels libres

La Direction Générale de la Modernisation de l'État (DGME) a publié, fin 2007, un « Guide pratique d'usage des logiciels libres dans les administrations ». Ce guide se présente sous forme de FAQ (Questions-Réponses ou Frequently Asked Questions) et a pour ambition de répondre aux interrogations essentiellement juridiques des administrations qui souhaitent utiliser des logiciels libres, et éventuellement contribuer ou redistribuer. Il traite notamment des questions de licences, mais aussi de la manière de rédiger son cahier des charges pour pouvoir exiger des logiciels libres. Ce document est voué à évoluer sous l'influence des remarques et des nouvelles questions amenées à être traitées.

Voir l'annonce du guide et le document PDF à télécharger.

Collectivités publiques

Une mention Libre pour les Villes Internet

L'April a participé à l'élaboration du questionnaire et au jury de la mention Libre du label Villes Internet. L'April était déjà présente en 2006 sur l'événement Villes-Internet, pour la première édition du label Libre. Souhaitant renforcer cette mention, dont l'obtention reposait sur une seule question ouverte, l'April a élaboré un questionnaire plus complet sur l'utilisation et le développement de logiciels libres par la ville. Sur une soixantaine de villes candidates, vingt-quatre ont obtenu la mention Libre. L'implication de l'April dans le label Villes-Internet, et la direction de cette mention Libre sont à la fois une reconnaissance de l'action de l'April et un gage de sérieux pour Villes-Internet. Le succès de la mention Libre pour l'édition 2007 laisse espérer qu'un engouement naîtra pour les villes candidates et les encouragera à s'engager dans le logiciel libre.

Adhésion de la première collectivité à l'April : Pierrefitte-sur-Seine

Pierrefitte-sur-Seine, commune de Seine-Saint-Denis en Région Parisienne, est depuis fin novembre 2007 la première collectivité adhérente de l'April. Pierrefitte-sur-Seine a été en septembre 2002 l'une des premières municipalités à mettre à disposition sous une licence logiciel libre (GNU GPL) une application développée en interne. Cette application de gestion d'espace public multimédia « EPNadmin » est utilisée par l'Arobase (Espace public multimédia municipal), mais également par d'autres espaces publics numériques. Catherine Hanriot, maire de Pierrefitte, estime qu'avec l'utilisation de logiciels libres et la contribution à certains projets, l'adhésion à l'April complète l'engagement de sa ville en faveur du Logiciel Libre.

Le Référentiel général d'interopérabilité (RGI) en suspens

Sous l'influence de certains éditeurs désavantagés par la recommandation d'utilisation du format ODF, les collectivités locales - en particulier les associations de maires - ont demandé la suspension du RGI qui leur était applicable. Invoquant une concertation trop rapide, des dépenses nouvelles et une atteinte à leur libre administration, des collectivités se sont opposées à la mise en oeuvre du RGI que les administrations de l'État appliquent d'ores et déjà spontanément de manière progressive. L'application du RGI n'a jusqu'ici toujours pas été décrétée, alors que le document technique est prêt depuis plus d'un an.

De nombreuses collectivités ont participé au travers des espaces publics numériques à l'initiative Libre en Fête (voir la partie Communautés).

Entreprises

L'année 2007 a vu une croissance soutenue du marché du logiciel libre, pour un chiffre d'affaires global en France de plus de 700 millions d'euros (730 MEUR selon Pierre Audoin, soit une progression de 66%, et 2,2 MdEUR en Europe)

Pour les entreprises, 2007 commence avec le traditionnel salon « Solutions Linux » (30 janvier au 1er février 2007 au Cnit-Paris La Défense), avec près de 200 exposants et 10 000 visiteurs. La société Tarsus prend la suite d'Infopromotions pour l'organisation du salon.

Le début d'année a été l'occasion d'annonce de migrations chez les industriels comme par exemple PSA Peugeot Citroën qui a annoncé en collaboration avec Novell/Suse la migration de 20 000 postes de travail sous GNU/Linux ; l'Union Bank of California, l'une des 25 plus grosses banques des USA, a elle fait part de sa migration d'AIX à « Red Hat Enterprise Linux ».

Pour la deuxième année consécutive a eu lieu à Paris l'évènement Paris Capitale du Libre les 13 et 14 juin 2007, avec conférences, stands, plénières, et la remise de Lutèce d'Or dans différentes catégories. Sur 2 jours plus de 60 intervenants de 10 nationalités différentes et près de 3000 visiteurs sont venus participer aux différentes tables rondes dédiées aux enjeux sociaux, économiques, politiques et technologiques des logiciels libres.

Le thème entreprises des Rencontres Mondiales du Logiciel Libre était particulièrement orienté vers les utilisateurs. Il a permisau novice en logiciel libre comme à l'utilisateur averti de découvrir différentes façons de bâtir le système d'information d'une entreprise à base de logiciels libres.

Le CIACT (Comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires) du 5 juillet 2007 a décidé d'adosser au pôle francilien System@tic un groupe de travail logiciel libre (voir la partie spécifique dans la rétrospective). Le pôle CapDigital est en train de mettre en place une commission traitant des communautés, du Web et du logiciel libre.

En juin 2007, l'Aful publie une mise à jour de son dossier « Modèles économiques liés aux logiciels libres ». Le Syntec publie une prise de position sur le logiciel libre. En septembre 2007, le cabinet de conseil faberNovel, publie un « research paper » intitulé « Modèles économiques des logiciels open source et logiciels libres : quelques points de repères ». En octobre, le centre de recherche public M@rsouin propose un modèle de typologie des modèles d'affaire du logiciel libre à partir d'une enquête réalisée auprès d'entreprises francophones annonçant utiliser des logiciels libres dans leur activité commerciale. En décembre 2007, l'April publie son livre blanc sur les modèles économiques du logiciel libre réalisé par des entreprises membres de l'association. Depuis la mise en ligne du livre blanc, celui-ci a été téléchargé plus de 6 000 fois.

Bull s'est associé en Juin avec plus éditeurs et intégrateurs de logiciels libres (Jboss, SpikeSource, OW2) pour lancer novaforge.org, un portail destiné aux entreprises qui référence plus de 200 applications libres.

Le logiciel libre n'est plus seulement accepté par les grands cabinets d'analyse tels que Gartner. Celui-ci conseille de le voir comme incontournable, puisqu'il représente déjà près du tiers des systèmes critiques des entreprises (Gartner Summit - 09/07).

Conscientes de l'importance de préserver l'écosystème du logiciel libre, de nombreuses entreprises produisant ou utilisant du logiciel libre ont adhéré à l'April en 2007. Une trentaine d'entreprises, dont une première société (Jardins et Loisirs) à ne pas être du domaine informatique, ont rejoint l'association. Le 1er octobre 2007, Christophe Le Bars, vice-président entreprises de l'April a été l'invité d'une causerie sur le thème « April et les entreprises ».

L'ASS2L (Association des sociétés de service en logiciels libres) s'est transformée en FNILL (Fédération nationale des industries du logiciel libre). A cette occasion, l'association a accueilli de nouveaux membres importants tels qu'IBM, Cap Gemini, Unilog ou Sopra.

De nouveaux évènements ont également fait leur apparition, comme le salon professionnel des Logiciels Libres à Marseille, en octobre. Celui-ci a réuni une trentaine de sociétés de la région PACA, avec la participation de la pépinière « logiciels libres » du pôle Marseille Innovation.

2007 a également vu la montée en puissance des logiciels de virtualisation (XenSource, OpenVZ), le succès de la 2ème conférence Paris on Rails (et le sortie de la version 2.0 en décembre) et PHP qui poursuit sa progression.

DRM et informatique déloyale

Le terme DRM signifie « gestion de droits numériques », mais aujourd'hui il s'entend surtout comme un dispositif qui contrôle les actes d'un utilisateur (Dispositif de Contrôle d'Usage). Les débats lors du projet de loi DADVSI ont parfaitement montré que le but premier des DRM est de contrôler l'usage privé des oeuvres numériques. Ces dispositifs de contrôle d'usage privé empêchent dans les faits de nombreux actes licites et légitimes. La loi DADVSI instaure une protection juridique censée permettre de lutter contre la contrefaçon des oeuvres musicales et audiovisuelles. Leur protection juridique en tant que « mesures techniques de protection » (MTP) est par ailleurs utilisée comme une arme anti-concurrentielle : l'absence d'interopérabilité des ces MTP/DRM et l'interdiction de les contourner permet aux éditeurs de logiciels d'emprisonner le consommateur dans une technologie et d'empêcher le développement de lecteurs interopérables par des concurrents.

Dans le milieu musical, l'année 2007 a été l'année du retournement de situation. Après une année 2006 consacrant juridiquement les DRM, l'industrie musicale vient de réaliser, plus d'un an après les protestations de leurs clients, que les DRM ne fonctionnent pas : lourdeur financière de la gestion des DRM pour les vendeurs, frein à l'achat par leur incompatibilité (il est par exemple impossible de lire un morceau acheté sur iTunes sur un autre baladeur qu'un iPod) et donc chute des ventes pour les maisons de disques... Fin 2007, la plupart des plates-formes de vente en ligne, dont les plus importantes (iTunes, FnacMusic...), proposent de la musique sans DRM avec l'accord des ayants-droit (certains, comme Warner, ont quand même attendu que leur cours de bourse fonde de plus de moitié en un an avant de réagir).

Néanmoins, tout n'est pas au beau fixe : les DRM sont toujours présents dans le faible catalogue de films disponibles en ligne. Il semble que l'industrie du film soit condamnée à faire les mêmes erreurs que l'industrie de la musique avec un décalage de quelques années : par exemple, elle a perdu un an dans la finalisation des deux formats haute définition concurrents (HD-DVD et Blu-ray) pour « protéger » leur contenu par une sorte de DRM, et il a fallu moins d'un mois pour que cette dispositif de contrôle ne soit déjoué.

On constate aussi un mélange des genres dans les offres : dans la deuxième moitié de 2007, les fournisseurs d'accès à internet se sont mis à proposer dans leurs offres Internet un abonnement musical. Ces abonnements, offrant un accès limité à des fichiers DRMisés, ne permettent pas d'accéder à la musique lorsque l'abonnement à Internet a pris fin. Au regard du faible succès médiatique, on peut néanmoins imaginer que 2008 ne verra pas l'expansion de ce type d'offre, fort coûteuse à mettre en place et peu vendeuse; en effet, qui pourrait imaginer arrêter d'écouter son groupe préféré quand il change de fournisseur d'accès ? De plus, durant l'année 2007, les clients qui pensaient acheter des morceaux de musique ont subi le revers des DRM : Virgin Digital et Sony Connect, pour ne prendre que les deux plus gros exemples, ont fermé leurs portes, et avec avec eux les serveurs d'authentification ; les clients se sont alors retrouvés du jour au lendemain avec des morceaux de musique qu'ils avaient achetés mais qu'ils ne pouvaient pas jouer sur leur équipement, faute d'autorisation par les serveurs manquants. Ce genre de péripétie ne peut que mettre à mal la volonté des clients de passer d'une offre illégale à une offre légale : qui irait racheter dans les mêmes conditions les fichiers pour lesquels il a déjà payé ?

La courte histoire des DRM a montré qu'ils ne servent pas à protéger de la contrefaçon (tous les DRM sont contournés rapidement). Au contraire, ils dissuadent les clients de recourir aux offres légales, moins simples à utiliser que le P2P où les fichiers ne font l'objet d'aucune restriction d'utilisation. L'histoire se répète (il y avait la même peur de l'industrie face à l'émergence de la radio et de la télévision), des formes d'industries disparaissent là où d'autres apparaissent ; les industriels de la musique et de l'audiovisuel devront s'adapter aux nouveaux marchés s'ils ne veulent pas s'éteindre.

Une chose est sûre : en 2007, les services qui ont augmenté leur chiffre d'affaires de manière importante étaient sans DRM. L'interopérabilité et la liberté d'usage leur apportent un taux de fidélisation deux fois plus important que les plateformes vendant des fichiers avec DRM.

Voir des informations complémentaires dans la partie de la rétrospective consacrée au DADVSI.

DADVSI

Parution du décret d'application au sujet des outils de contournement

Fin décembre 2006, le gouvernement a fait paraître au Journal Officiel le décret d'application de la loi DADVSI (loi relative au droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) sur l'interdiction de contournement d'une Mesure Technique de Protection (MTP ou DRM). Conformément à la censure du Conseil Constitutionnel, qui a supprimé l'exception de contournement à des fins d'interopérabilité, le décret punit d'une amende de 4ème catégorie (montant compris entre 4 500 et 11 250 euros) tout contournement d'une MTP à l'aide d'un dispositif ou service 'spécialement conçu ou adapté'. Voir le décret du 23 décembre 2006 « relatif à la répression pénale de certaines atteintes portées au droit d'auteur et aux droits voisins ».

Si vous contournez par vos propres moyens, vous encourez 3 750 euros d'amende. Quant aux concepteurs et diffuseurs de ces dispositifs, ils risquent pour leur part 6 mois d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende.

Le décret attaqué par l'April au Conseil d'État

Ce décret visant les auteurs et utilisateurs de logiciels libres, l'April a déposé, le 21 février 2007, une requête en annulation devant le Conseil d'État. La procédure suit son cours, bien que le Conseil d'État n'ait pas rendu sa décision à ce jour. Lire le communiqué de l'April.

Mission Olivennes, rapport, accord

Denis Olivennes, PDG de la Fnac, a été chargé par le Président de la République, via la ministre de la culture, de mener une mission sur le développement des offres de biens culturels et la lutte contre la copie numérique non autorisée.

L'April a été auditionnée par la mission Olivennes le 12 octobre 2007. Les représentants de l'April ont démontré que les DRM sont nocifs, que leur interopérabilité est un leurre, et que les mesures envisagées (riposte graduée et filtrage) sont des impasses. Lire le texte complet de la contribution de l'April.

Le rapport remis au Président de la République le 23 novembre 2007 fut malheureusement sans surprise, tout comme l'accord interprofessionnel qui en découle. Les pouvoirs publics et les signataires s'engagent sur divers points : timide retrait (partiel et sous conditions) des DRM, sans toutefois renégocier leur protection juridique ; mise en oeuvre de la riposte graduée et collaboration des FAI (Fournisseurs d'Accès à Internet) avec les industries culturelles ; expérimentation du filtrage (contenus, protocoles) ; en échange des efforts des FAI, les industries culturelles consentent à réviser la chronologie des médias et à ouvrir les catalogues.

Le magazine PC INpact y consacre un article : Mission Olivennes : les mesures Sarkozy pour civiliser l'Internet

Non content de porter atteinte aux libertés individuelles avec des mesures de répression de masse et de censure sous prétexte de « civiliser l'Internet », le Président de la République a promis dans son discours d'aller plus loin si lesdites mesures ne suffisaient pas à enrayer le 'piratage'.

Liens complémentaires :

Ventes liées

Les attentes pour 2008 sont à la hauteur de celles de 2007 : « le résultat des actions en justice de l'UFC-Que Choisir, la dernière réunion avec la DGCCRF, la mise en place de l'optionnalité pour les logiciels et les actions en justice intentées par le GdT Détaxe. », ainsi se concluait la rétrospective 2006 sur la vente liée. Force est de constater pour cette rétrospective 2007 que nous n'allons pas nous reposer en 2008 !

Le procès de l'UFC-Que Choisir est toujours en cours, le jugement n'est attendu qu'au début de l'année 2008.

La dernière réunion avec la DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes), qui aurait du avoir lieu en janvier 2007... n'est toujours pas planifiée. Cela est d'autant plus contrariant que le Président de la République française Nicolas Sarkozy, dans sa réponse au questionnaire Candidats.fr, conditionnait son intervention contre la vente liée aux résultats de ces réunions : « C'est le sens des consultations actuellement en cours à la DGCCRF [...] J'agirai en fonction des résultats de ces consultations ». Six mois plus tard, alors que les consultations sont toujours au point mort, Luc Chatel, secrétaire d'État à la consommation et au tourisme, cautionne ce gel de l'action publique : « Le Gouvernement a donc confié à la DGCCRF une mission d'expertise, qui est suspendue mais reprendra lorsque seront connus les résultats de l'action intentée par une association de consommateurs - soit au début de l'année prochaine ». En clair, le gouvernement choisit de se retrancher derrière l'UFC-Que Choisir plutôt que d'assumer ses responsabilités. La Direction Générale de la Consommation, de la Concurrence et de la Répression des Fraudes, placée sous son autorité, reste donc passive au lieu de mettre un terme à un problème de consommation grand public et de pratiques anti-concurrentielles. L'abus de position dominante par la vente liée a pourtant déjà été sanctionné par la Commission européenne, ouvrant la voie à des mesures concrètes dans les États membres.

Notons également que la lettre ouverte aux constructeurs écrite par l'Aful et co-signée par l'April, n'a pour l'heure obtenu aucune réponse. Une relance est en cours, qui apportera on l'espère de meilleurs résultats.

En fin d'année, devant l'inactivité croissante des pouvoirs publics en général et de la DGCCRF en particulier, l'April, l'Aful, l'UFC Que Choisir et la CLCV ont adressé un courrier à Monsieur Bruno Parent, Directeur Général de la DGCCRF, ainsi qu'au secrétariat d'État à la consommation et au Ministère de l'Économie, pour demander des actions concrètes sur ce dossier.

La bonne nouvelle est finalement venue d'un particulier qui a obtenu en septembre 2007 un jugement particulièrement favorable au tribunal de Puteaux : il a obtenu 311,85 euros de remboursement de logiciels. Le jugement complet est disponible en ligne.

Brevets sur les logiciels

En ce qui concerne les brevets logiciels, l'année 2007 a en fait commencé dès décembre 2006 et la remise du rapport Lévy/Jouyet sur l'économie de l'immatériel. En effet, ce rapport a dicté tout au long de l'année la position défendue par la France dans les discussions en cours au niveau européen visant à instaurer une juridiction unifiée traitant des litiges sur les brevets. Dès la publication de ce rapport, l'April avait dénoncé sa reprise de la rhétorique fallacieuse prétendant que seuls les logiciels présentant un effet « technique » peuvent être brevetés en Europe. Or, comme nous le verrons, l'année 2007 a continué d'apporter les preuves que l'Office européen des brevets (OEB) et l'INPI en France, délivrent des brevets sur des algorithmes, des protocoles, des formats de fichiers, etc. Et si ces brevets logiciels peuvent encore être invalidés par les tribunaux nationaux, ils constituent une menace particulièrement dissuasive contre les développeurs et utilisateurs de logiciels libres et les PME européennes. Par ailleurs, on a certes pu se réjouir que le rapport refuse qu'une éventuelle Cour centrale européenne des brevets, ainsi que le proposait l'EPLA (Accord sur le règlement des litiges en matière de brevet européen), soit placée sous la tutelle de l'OEB dont le contrôle politique est jugé douteux. Mais l'April reste vigilante quant à la solution prônée d'unifier les litiges concernant les brevets au sein de la Cour de justice des Communautés européennes (CECJ), tant que les modalités de fonctionnement d'une telle juridiction unifiée ne sont pas précisées. Il est en effet important de garantir que cette juridiction unifiée disposera de suffisamment d'indépendance démocratique pour ne pas simplement se contenter d'avaliser les pratiques déviantes des offices de brevets.

Confortant la position du rapport Lévy/Jouyet, le service juridique du Parlement européen a publié un avis en février 2007 stipulant que l'EPLA était une impasse juridique si l'on souhaitait améliorer le système de brevets en Europe. En avril 2007, la Commission européenne proposait ainsi un « consensus » visant à intégrer les principes de l'EPLA dans une juridiction dépendante de la CJCE, apte à régir les contentieux tant sur les brevets européens, délivrés par l'OEB qui est une institution inter-étatique hors de l'Union européenne, que sur d'hypothétiques futurs brevets « communautaires », titres de propriétés unique pour l'Union européenne sur lesquels les discussions sont gelées depuis 2004. Sur cette base, les États membres, représentés par des diplomates et des membres des offices de brevets nationaux, ont poursuivi leur travaux durant les présidences allemande et portugaise de l'Union européenne. Durant tout ce temps, la France est resté quelque peu spectatrice des débats, confortée par le fait que l'avancement des discussions restait dans la ligne dessinée par le rapport Lévy/Jouyet.

Pendant ce temps, la thématique des brevets logiciels s'est invitée dans la campagne pour l'élection présidentielle en France, principalement via l'initiative Candidats.fr lancée par l'April. On y a vu le centriste François Bayrou tanguer entre un soutien au logiciel libre et une reconnaissance des avantages du brevet logiciel pour certaines entreprises. On aura salué le rapport remis par Michel Rocard à la candidate socialiste Ségolène Royal, préconisant notamment « une refonte profonde du système des brevets en Europe en donnant le pouvoir au Parlement avant toute réforme juridictionnelle ou sur les langues, pour que le Parlement européen soit le premier législateur et gardien d'une définition communautaire du brevet européen ». Au final, huit candidats sur douze ont répondu au questionnaire de candidats.fr et tous se sont tous déclarés, à des degrés divers, opposés au projet d'EPLA. Tous, sauf Nicolas Sarkozy qui n'a pas daigné répondre directement aux questions et qui a archaïquement défendu l'efficacité des systèmes de brevets, soutenant même insidieusement les brevets logiciels.

N'en déplaise au nouveau président français, comme dans les années précédentes, les brevets logiciels ont continué à faire parler d'eux en 2007 principalement par les dégâts et coûts qu'ils engendrent. Sur ce point, les États-Unis, où les brevets logiciels sont validés par les offices et les tribunaux depuis les années 90, offrent un contre-exemple que les décideurs européens seraient sages de prendre en compte. Ainsi, dans un procès entamé dès 2003, Microsoft s'est vu infliger en février 2007 une amende record de plus d'un milliard et demi de dollars pour violation des brevets détenus par Alcatel-Lucent sur le format MP3, avant que cette décision ne soit renversée en appel en août 2007. Les sommes pharaoniques mises en jeu confirment la puissance des brevets logiciels lorsqu'ils sont employés comme armes anti-concurrentielles. Et Microsoft n'hésite pas de son côté à user de ces armes de manière dissuasive, en répandant la rumeur que le noyau Linux violerait pas moins de 235 de ses brevets. Et bien que Microsoft n'ait jamais appuyé ses allégations, c'est IP Innovation, une société dont le modèle d'affaires repose sur le commerce de licences de brevets et les litiges associés (ce qu'on appelle « troll »), qui s'est chargée de porter plainte contre deux distributeurs principaux du système GNU/Linux. Ces dysfonctionnements liés aux brevets logiciels outre-atlantique sont pour le moins préoccupants. Et sous fond de réforme du système des brevets, la Cour suprême des États-Unis a rendu en avril 2007 deux décisions dénonçant les pratiques laxistes de la juridiction d'appel unifiée spécialisée dans les brevets (CAFC). On est alors en droit de se demander si l'Union européenne n'est pas en train de refaire les mêmes erreurs avec le projet de Cour européenne des brevets.

Et 2007 a également démontré que les pratiques d'octroi de brevets logiciels en Europe n'avaient rien à envier aux dérives constatées aux États-Unis. Malgré le manque d'innovation des partisans des brevets logiciels, rabâchant comme pour se convaincre eux-mêmes, que de ce côté-ci de l'Atlantique, on ne délivre pas de purs brevets logiciels, l'actualité n'a pas été avare d'exemples prouvant l'inverse. On peut citer par exemple un brevet sur le format FAT invalidé en Allemagne en mars 2007, ou un brevet d'Amazon sur l'offre de cadeaux en ligne, descendant du fameux brevet « 1-click » annulé par l'OEB dans une procédure d'opposition à laquelle prenait part la FFII. Toutefois, ces affaires n'ont fait qu'opposer à la validité de ces brevets un manque de nouveauté ou d'inventivité. L'office britannique a été plus loin en rejetant en août 2007 un brevet de Symbian au motif que ce qu'il revendiquait comme étant inventif ne couvrait en tout et pour tout qu'un algorithme. Si invalider des brevets logiciels prouve qu'ils sont bel et bien une menace en Europe, la Commission européenne a malheureusement adopté une toute autre méthode de reconnaissance de leur existence. En effet, suite à la confirmation par la CJCE des pratiques anti-concurrentielles de Microsoft, la Commission a conclu en octobre 2007 un accord, à propos duquel elle a communiqué de manière particulièrement maladroite, en concevant que pour mettre en oeuvre des techniques interopérables avec les protocoles et algorithmes couverts par les brevets de Microsoft acceptés par l'OEB, il faudrait s'acquitter d'une licence représentant 0.4% des revenus obtenus sur ces produits et services concurrents. Et ce, malgré le fait que le droit européen interdise théoriquement de tels brevets.

Enfin, pour conclure cette rétrospective 2007 concernant les brevets logiciels, il faut revenir sur le rapport Lévy/Jouyet. En effet, Jean-Pierre Jouyet est devenu depuis secrétaire d'État aux affaires européennes et, peu à peu, on a pu voir s'appliquer les recommandations du rapport qu'il a corédigé. Dès le mois de juillet 2007, il publiait avec Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, un article dans lequel était encouragée la ratification du Protocole de Londres, la promotion du brevet communautaire et d'un système juridictionnel où le contentieux des brevets serait confié à la CJCE. La ratification du protocole de Londres, limitant la traduction d'un brevet européen aux seules revendications alors que la description complète peut rester en anglais, a été votée en octobre 2007. Au détour de la loi sur la lutte contre la contrefaçon, il faut également noter l'instauration de chambres des tribunaux de grande instance spécialisées dans les atteintes aux droits de « propriété intellectuelle », y compris des brevets. Tout ceci reste en ligne avec le rapport Lévy/Jouyet et à la position, silencieuse, tenue par la France dans les négociations au Conseil de l'Union européenne. Ces négociations ont soulevé inquiétudes et questions, de la part d'eurodéputés comme de députés français. Ces interrogations posent notamment un problème majeur du projet d'unification européenne des juridictions liées aux litiges sur les brevets : sur quelles bases juridiques la Cour européenne des brevets va-t-elle rendre ses décisions ? Sur une interprétation stricte de la Convention européenne des brevets, qui au passage ne fait pas partie de l'acquis communautaire ? Ou sur l'interprétation déviante de la jurisprudence de l'OEB, notamment en ce qui concerne les brevets logiciels ? Bref, n'est-on pas en train de poser les murs avant les fondations ?

Les négociations au Conseil de l'UE vont se poursuivre et nul ne doute qu'en assurant la présidence de l'Union européenne au second semestre 2008, la France aura un rôle majeur à jouer. Alors qu'un prix Nobel d'économie, après celui attribué en 2001 à Joseph Stiglitz, a été décerné en novembre à nouveau à un opposant aux brevets logiciels, Eric Maskin, la lutte contre les brevets logiciels aura matière à se mobiliser durant cette nouvelle année et constituera un axe fort de l'action de l'April en 2008.

OOXML, la suite du feuilleton

En 2007, la bataille d'influence autour de la normalisation des formats de documents bureautiques a atteint un paroxysme, sans pour autant qu'une issue définitive ait pu être trouvée.

Les spécifications représentatives des formats de fichiers Office 2007 avaient été promues en fin 2006, à la demande Microsoft, au rang de « standard international » par le consortium international ECMA sous la dénomination Office Open XML File Formats et le nom de code ECMA-376 (en abrégé OOXML). Ces spécifications, volumineuses et complexes, attribuent une importance prioritaire à la reprise des fonctionnalités des logiciels bureautiques passés et présents liés à l'univers Microsoft. De ce fait, elles comprennent de nombreux éléments propriétaires et tendent en outre, au nom d'impératifs de compatibilité mal documentés, à standardiser des bogues ou des imperfections techniques au détriment de l'ouverture et de la compatibilité avec les standards ouverts existants. Malgré tout, Microsoft, par l'intermédiaire de l'ECMA, a entrepris de faire valider OOXML par l'ISO en tant que norme internationale au moyen d'une procédure accélérée ('fast track'). Le JTC1 (comité technique commun ISO/IEC compétent en matière de technologies de l'information) a accepté le principe d'une telle procédure malgré la taille exceptionnelle du projet et surtout malgré l'existence antérieure du standard ISO/IEC 26300 Open Document Format for Office Applications (ODF) validé en 2006, portant lui aussi sur les formats de documents bureautiques.

Ainsi, une spécification liée aux produits d'un acteur en position dominante sur le marché des logiciels bureautiques et en compétition directe avec un standard ouvert a donc été, de fait, déclarée « admissible » au statut de norme internationale. Cette situation a créé un doute sur la fiabilité du mode d'élaboration des normes et provoqué, parmi les défenseurs des standards ouverts et des logiciels libres, une mobilisation sans précédent. Dans ce contexte, l'April a adressé à l'AFNOR une lettre ouverte dénonçant la gravité des risques techniques et politiques inhérents à ce projet de norme. L'Aful a appellé l'AFNOR et les organisations de normalisation francophones à s'opposer à l'usage de la procédure accélérée dans l'examen d'une deuxième norme bureautique à l'ISO .

L'adoption définitive d'une norme internationale par l'ISO passant par un système de vote complexe auquel participent de nombreux pays par l'intermédiaire de leurs bureaux de normalisation nationaux respectifs, l'AFNOR, représentant la France, a créé en mai 2007 une commission d'experts spécialisée, à laquelle notamment l'April et l'Aful ont participé. Les travaux se sont déroulés principalement de juin à août 2007, délai extrêmement bref compte tenu de la lourdeur des documents à analyser. Au manque de temps s'est ajouté un manque de motivation d'une grande partie de la commission pour les approfondissements techniques, et la nature politique du débat n'a pas cessé de se confirmer. L'enquête publique qui s'est déroulée en parallèle n'a pas modifié cette tendance. La direction de l'AFNOR n'a donc pas pu obtenir un avis d'experts consensuel et a finalement tranché elle-même.

Rejoignant une orientation gouvernementale exprimée en début d'année, elle a émis un vote négatif avec commentaires tout en proposant un plan de convergence à moyen terme entre ODF et OOXML. Au niveau international, malgré un lobbying d'une ampleur sans précédent dans les annales de la normalisation, c'est finalement le « non » à OOXML qui l'a emporté, mais de justesse. La bataille est loin d'être terminée ; en effet, c'est seulement la procédure de validation accélérée qui a échoué jusqu'à présent, mais la décision finale sera prise en 2008, notamment à la suite d'une réunion des comités nationaux de normalisation (à laquelle l'AFNOR participera) prévue fin février 2008.

En marge du débat international sur OOXML, l'AFNOR a par ailleurs décidé, au moins provisoirement, de ne pas adopter la norme internationale ODF (ISO/IEC 26300) comme norme française. Cette décision n'a été ni vraiment débattue ni vraiment expliquée ; elle soulève cependant quelques interrogations, tant sur la norme ODF que sur la stratégie française des standards, car il est extrêmement rare que l'AFNOR refuse de valider une norme ISO.

Quel que soit le résultat final, on peut d'ores et déjà dire que l'affaire OOXML a largement pris de court les circuits de décision de l'ISO qui semblent avoir été submergés plus que de coutume par les leviers d'influence d'un acteur commercial. Au-delà de ce débat, c'est la fiabilité du système de normalisation qui est désormais en jeu. Or il est évident que les normes et standards constituent l'un des facteurs-clés du développement des systèmes ouverts en général et du logiciel libre en particulier. La vigilance est de mise car l'année qui vient s'annonce aussi décisive que celle qui vient de s'achever.

Éducation

Parmi les temps forts du libre éducatif en 2007 figure d'abord l'opération de la région Île-de-France qui, à la rentrée de septembre 2007, a doté tous les lycéens de seconde, les apprentis et les enseignants franciliens d'une clé USB comportant des logiciels libres : soit 220 000 clés USB ! Autre évènement de la rentrée scolaire 2007, le succès du manuel scolaire Sésamath libre de mathématiques pour la classe de quatrième qui s'est vendu à 90 000 exemplaires (à un prix « raisonnable »). Le succès de 2006 avec le manuel libre de mathématiques pour la classe de cinquième (72 000 exemplaires) est donc confirmé.

Autre évènement, lors de la campagne présidentielle, les questions posées conjointement aux candidats par l'April et l'EPI (association Enseignement public et informatique). Les réponses ([1] et [2]) ont traduit la montée de l'audience du libre dans le système éducatif.

Et puis, il y a tout ce qui ne fait plus évènement parce que le libre se développe et se banalise. Que de chemin parcouru depuis la signature en octobre 1998 par le Ministère de l'Éducation nationale et l'Aful d'un accord-cadre, régulièrement reconduit depuis lors, malgré des freins et des résistances. Les ruisseaux de l'époque sont devenus un long fleuve (pas toujours tranquille !) qui poursuit son cours. Rien d'étonnant à cela quand on sait que l'approche du libre correspond aux missions du système éducatif et à la culture enseignante d'appropriation de la connaissance par tous.

La quasi totalité des serveurs de l'administration centrale et des rectorats sont des serveurs GNU/Linux. De l'ordre de 15 000 serveurs de communication libres équipent les académies et les établissements. L'association Framasoft et l'ENT libre Iconito de la société Cap-Tic ont été lauréats des Lutèces d'or. Le centre national de documentation pédagogique (CRDP) de Paris exprime des besoins éducatifs dans le cadre du Groupe Thématique Logiciel Libre (pôle de compétitivité System@Tic, Paris-Région) dont il est membre.

Le pôle de compétences logiciels libres du SCÉRÉN regroupe désormais 23 CRDP et développe son action d'information, de fédération des acteurs internes et externes à l'Éducation nationale (collectivités locales, associations, entreprises), d'expertise, de conseil et de réalisation. Les espaces consacrés au libre éducatif dans les manifestations, dédiées ou non, sont toujours de véritables « fourmilières » : Solutions Linux, Educatice, Paris Capitale du Libre, les Rencontres Mondiales du Logiciel Libre, les Rencontres de l'Orme, les Trophées du libre, InterTice... Les conférences et tables rondes se multiplient et se diversifient, au plan national et dans les régions, concernant les enjeux et l'existant du libre en matière de logiciels, de ressources pédagogiques, de formation du citoyen.

Matériel

L'évènement de l'année 2007 du coté du matériel est sans aucun doute l'annonce le 10 septembre 2007 par la société AMD (qui a racheté le fabriquant de cartes graphiques ATI) de son intention de rendre publiques les documentations de ses cartes graphiques haut de gamme. Les documentations publiées depuis ne permettent pas encore d'écrire un pilote complet mais AMD a l'air de tenir ses promesses vis à vis de la communauté et a en particulier embauché un développeur libre bien connu du monde des pilotes graphiques. Et, plus important pour l'avenir, AMD a précisé le 29 décembre 2007 que les nouvelles générations de matériel prendront en compte dans leur conception les besoins des pilotes sous licence libre. Toujours sur le sujet des cartes graphiques, Intel continue les développements des pilotes de ses cartes graphiques qui savent maintenant changer la résolution en se passant complètement du BIOS. De son coté le 15 octobre 2007 le projet Open Graphics a annoncé la finalisation des spécifications matérielles.

Dans le monde sans fil, Intel a décidé de faire évoluer les firmware de certaines de ses puces wifi de manière à pouvoir se passer d'un logiciel propriétaire de régulation, l'utilisateur obtient ainsi un pilote entièrement libre : encore un exemple de société qui prend en compte les spécificités du logiciel libre dans ses développements matériels.

Du coté des processeurs, la société Sun Microsystems (membre de l'April) continue son effort de libération des spécifications de ses processeurs SPARC via le projet OpenSPARC, et a publié le 11 décembre 2007 les spécifications de son processeur multi core « Niagara » sous la licence GPL.

Pour les imprimantes fin 2007 la société Hewlett-Packard propose désormais le support de 1 257 de ses modèles d'imprimante via le pilote libre « HPLIP ».

Un autre marché où les logiciels libres se développent est celui de l'électronique grand public et des systèmes embarqués : la rétrospective 2007 du site LinuxDevices rappelle que 1 200 articles couvrant ce type de matériel ont été publiés en 2007.

En janvier 2007 l'enregistreur multimédia « Neuros OSD » basé sur GNU/Linux reçoit un prix Consumer Electronique Show 2007 et un an après un article dans le New York Times rappelle que la devise derrière le produit est « bienvenue aux hackers, voila la documentation du matériel et faites ce que vous voulez avec ». Le constructeur Nokia met sur le marché deux modèles de tablettes internet : le N800 en janvier 2007 et le N810 en décembre 2007 basés sur un dérivé de Debian GNU/Linux appelé maemo qui fonctionne à l'identique sur les deux produits. En juillet 2007 la première version développeur du téléphone à plateforme ouverte Neo1973 est mis en vente avec une version grand public qui est prévue pour début 2008. En novembre 2007, toujours dans le monde de la téléphonie la société Google lance sa plateforme ouverte pour téléphone Android mais les codes sources ne sont pas encore disponibles.

En octobre 2007 ASUS annonce un ultra-portable avec GNU/Linux préinstallé : le ASUS Eee PC. De manière amusante des amateurs essaient d'installer Microsoft Windows sur la plateforme par leur propre moyen car ASUS a annoncé mais pas encore livré ce système d'exploitation pour sa machine. En novembre, la production en masse du portable éducatif « One Laptop Per Child » commence. Et toujours en novembre 2007 la société Neuf Cegetel (membre de l'April) lance « My Easy » un PC internet « sans soucis » avec abonnement mensuel, aussi sous GNU/Linux.

Pour terminer la revue des matériels 2007 à l'autre bout du spectre de puissance : 91.8% des 500 plus gros super-calculateurs installés dans le monde sont basés sur GNU/Linux qui augmente encore son emprise d'après le classement TOP500 de novembre 2007.

Les nouvelles versions des licences GNU GPL, LGPL, et AGPL

Il y a deux ans, la Free Software Foundation a entamé la mise à jour de ses licences afin de les adapter aux nouveaux usages développés postérieurement à leur rédaction, en 1991 pour la plupart.

Deux vagues successives (la première le 29 juin, et la seconde le 9 novembre 2007), ont respectivement donné lieu à publication des nouvelles versions des GNU GPL (v3) et GNU LGPL (v3) et de la GNU Affero GPL (v3) (dite aussi AGPL). La prochaine et dernière vague sera consacrée aux licences non logicielles qui seront dorénavant au nombre de deux : la GNU FDL (v2), et la nouvelle SFDL (v1) (pour GNU Simpler Free Documentation license — qui supprime les sections invariantes et simplifie en général la GFDL).

Ces nouvelles versions ont été le fruit d'une concertation et discussion que nulle autre licence n'a eue jusqu'à maintenant, s'appuyant sur une vaste procédure d'appel à commentaires, durant l'élaboration, et lors de la réécriture de chaque version. Grâce à ceci, les apports sont à la hauteur de nos attentes, et cette mise au goût du jour devrait permettre aux logiciels libres de continuer la mutation sociale et sociétale qu'ils engendrent.

Sur la forme, les trois licences s'affichent bien entendu avec une compatibilité parfaite au profit de la GNU GPL et s'offrent une modularité qui permet de faciliter leur utilisation conjointe. Si les améliorations ont pesé sur la lisibilité des licences, la FSF a bien fait attention à uniformiser leur similitude. Ainsi, la GNU LGPL apparaît finalement comme une exception à la GNU GPL (en se concentrant sur les droits supplémentaires accordés, et renvoyant à la GNU GPL pour le reste de ses termes). De même, l'Affero GPL ne se distingue de la GNU GPL que par une clause qui lui permet de s'adapter aux spécificités des logiciels voués à être utilisés via le réseau sans avoir à être distribués (SOA) — ceux-ci devront alors permettre aux utilisateurs de bénéficier de la version du logiciel utilisée par ledit service, comblant ainsi ce que l'on avait dénommé l’« ASP loophole ». Enfin, un travail de rédaction a aussi permis d'internationaliser les licences et d'assurer leur validité pour l'ensemble des systèmes juridiques.

Sur le fond, les changements sont nombreux et ne peuvent qu'être listés (le wiki de Veni, Vidi, Libri en propose une analyse plus détaillée ) :

  • une « obligation de cohérence » interdit à l'utilisateur de limiter par d'autres voies, ou droits exclusifs concurrents, les libertés qu'il concède par la licence : que ce soit à l'égard des Mesures Techniques de Protection, des limitations matérielles (Tivoïsation), ou encore des brevets ;
  • un encadrement des accords parallèles portant sur des brevets (c'est ici une réponse à l'accord Novell/Microsoft) agit tant du côté du promettant qui s'obligerait à ne pas opposer ses brevets qu'à celui qui en bénéficierait ;
  • une modularité est intégrée afin de permettre d'intégrer d'autres briques logicielles sous licence a minima aussi libre (disposition profitant à la compatibilité avec des licences comme la licence Apache, LaTeX, etc.) ;
  • des adaptations technologiques (comme la distribution par peer to peer).

Garante du rôle qu'elle s'est donnée, la Free Software Foundation assure par ces mises à jour la pérennité des libertés qu'elle prône, sans aucune concession.

Contributeurs

Ont participé à la rédaction de cette rétrospective :

  • Jean-Pierre Archambault
  • Jean-Christope Becquet
  • Alix Cazenave
  • Frédéric Couchet
  • Philippe Davy
  • Jean-Marie Gouarné
  • Laurent Guerby
  • Benjamin Jean
  • Jérôme Martinez
  • Jeremy Monnet
  • Philippe Pary
  • Jean Peyratout
  • Thomas Petazzoni
  • Gérald Sédrati-Dinet
  • Benoît Sibaud