Cycle de concertation de la DGGCRF sur la vente liée ordinateurs/logiciels

Contexte

La DGCCRF a lancé fin 2006 un cycle de concertation sur la question de la vente liée ordinateurs/logiciels.

Deux premières réunions avaient eu lieu fin 2006 : une première avec les représentants des consommateurs et des utilisateurs et auteurs de logiciels libres (voir l'article sur PC INpact); une seconde avec les professionnels (constructeurs et distributeurs). Une dernière réunion devait réunir tous ces acteurs pour tenter de trouver des solutions au problème de la vente liée.

Récemment à l'occasion d'une réponse à une question écrite du député Philippe Tourtelier, Luc Chatel indiquait que la DGCCRF n'a pu mener à bien sa mission de conciliation entre les représentants des industriels et des consommateurs en raison de trop fortes divergences entre les parties. Ce qui est assez surprenant, compte tenu du fait que la réunion de synthèse qui devait mettre tout le monde autour de la table, et donc permettre de confronter les positions et arguments de chacun, n'avait toujours pas été convoquée depuis janvier 2007.

Finalement la DGCCRF a convoqué la réunion de synthèse qui doit clore son cycle de concertations sur la vente liée ordinateurs/logiciels. Elle a eu lieu le 3 juillet 2008 avec les représentants des consommateurs, des auteurs et utilisateurs de logiciels libres, des constructeurs et des distributeurs. Lire l'article de PC INpact.

À quelques heures de la réunion de synthèse à la DGCCRF sur le dossier vente liée ordinateurs/logiciels, le secrétaire d'Etat à la consommation, Luc Chatel, a indiqué dans une interview accordée au Parisien le jeudi 3 juillet 2008 (page 15)

« Je souhaite que, sur le montant des ordinateurs, on précise le prix des logiciels préinstallés,
 afin que les consommateurs aient le choix et puissent se faire rembourser ».

Il est indispensable que les distributeurs affichent le prix des différents éléments (matériel et logiciels) mais, pour l'information du consommateur, il faut également afficher les conditions d'utilisation des différents éléments logiciels.

Il faut également prévoir l'optionnalité des offres (à savoir la possibilité pour un consommateur de n'acheter que les éléments qu'il souhaite). L'optionnalité consiste tout simplement à ne pas forcer le consommateur à acheter les logiciels préinstallés. Le consommateur doit pouvoir, en magasin, acheter un ordinateur sans acheter les logiciels, ou choisir d'acheter le système d'exploitation mais pas les autres logiciels. Le consommateur ne doit payer que les éléments qu'ils comptent utiliser et repartir du magasin sans avoir à devoir se lancer ensuite dans une procédure de remboursement des éléments qu'il ne souhaite pas utiliser. Une procédure de remboursement ultérieure à l'achat n'est donc pas une solution acceptable pour le consommateur.

Pour la réunion à la DGCCRF, nous espérions faire aboutir nos propositions visant à garantir l'information des consommateurs et l'optionnalité des offres.

Lors de cette réunion étaient présents une cinquantaine de représentants des consommateurs, des auteurs et utilisateurs de logiciels libres, des constructeurs et des distributeurs. Jérémy Monnet, membre du conseil d'administration, et Frédéric Couchet, délégué général, représentaient l'April lors de cette réunion. Bénédicte Pascal, stagiaire juriste, était également présente.

En résumé rapide : les débats ont tourné en rond autour de deux propositions de la DGCCRF : - faciliter les procédures de remboursement ; - optionnalité du système d'exploitation par clé d'activation.

Pour rappel le remboursement n'est pas une mesure suffisante selon nous.

Les fabricants et distributeurs n'ont proposé rien de constructif et ont même prétendu, concernant l'optionalité, n'avoir pas été prévenus que ce point serait discuté. Alors que c'est, en plus de l'affichage des prix et des conditions d'utilisation des logiciels, notre demande principale depuis longtemps.

Finalement le directeur général de la DGCCRF les a mis devant leurs responsabilités en actant l'échec des discussions et en indiquant qu'il ne restait finalement que deux voies possibles : laisser les tribunaux continuer à trancher la question (mais ce n'est pas une solution acceptable) ou alors les pouvoirs publics prendront leurs responsabilités et imposeront des mesures.

Le directeur général de la DGCCRF a donc rappelé que la balle est dans le camp des fabricants et distributeurs, à eux de la saisir. On ne peut que se réjouir que les pouvoirs publics semblent prêts à prendre leurs responsabilités et que notamment Luc Chatel semble revenir à ses convictions de députés. Mais nous serons vigilants sur le contenu exact des mesures qui seraient prises et leur efficience par rapport à l'objectif affiché qui est de mettre un terme à la vente liée ordinateurs/logiciels. Comme nous l'avons déjà dit nous demandons l'affichage des prix des différents éléments, les conditions d'utilisations des différents éléments logiciels, et enfin l'optionnalité des offres (à savoir la possibilité pour un consommateur de n'acheter que les éléments qu'il souhaite). Le remboursement n'est pas une mesure suffisante.

Il est regrettable par ailleurs que certains acteurs, tels qu'HP, continuent de nier la réalité de la vente liée en considérant l'ordinateur avec le système d'exploitation comme un seul et même produit. La comparaison avec la voiture et ses pneus est foireuse et fausse. Entendre ce genre de comparaison en 2008 montre une méconnaissance du dossier ou une mauvaise foi à toute épreuve.

Une petite revue de presse :

  • Déclarations de Luc Chatel - « Ordinateurs et systèmes d'exploitation: Luc Chatel veut la fin de la vente liée »
  • « AFP - Chatel veut faciliter le remboursement des logiciels pré-installés »
    «Frédéric Couchet, délégué général de l'Association pour la promotion et la recherche en informatique libre (April), s'est tout de même dit 'optimiste', soulignant que 'la DGCCRF a été claire sur le fait que les pouvoirs publics prendraient leurs responsabilités' si aucune avancée n'est constatée.»
  • « AFP - Luc Chatel veut faciliter la vente de PC sans Windows »
    «Dans un second temps, le gouvernement veut donner au consommateur « le choix entre des ordinateurs avec un système d'exploitation pré-installé et sans système, mais aussi entre plusieurs systèmes ». Concrètement, « nous pourrions imaginer que les logiciels ne seraient activés que sur remise d'un code », a-t-il souligné. C'est très exactement la demande formulée jeudi matin par l'April, qui soutient le logiciel libre. Un groupe de travail sera mis en place à la rentrée pour travailler sur ce sujet.»
  • « Vente liée : Luc Chatel désormais favorable au remboursement » (PC INpact)
  • « Ordinateurs et systèmes d'exploitation : Luc Chatel veut la fin de la vente liée » (ITR Manager)
  • « Vente liée : la DGCCRF serait favorable au remboursement du système d'exploitation » (ZDNet)
    « Je crois que le message envoyé par la DGCCRF est que la balle est désormais dans le camp des fabricants et distributeurs », indique Frédéric Couchet, délégué général de l'April. »
  • « Vente liée PC et OS : des solutions promises dès septembre » (PC INpact)
    « Il est regrettable par ailleurs que certains acteurs, tels qu'HP, continuent de nier la réalité de la vente liée en considérant l'ordinateur avec le système d'exploitation comme un seul et même produit. La comparaison avec la voiture et ses pneus est foireuse et fausse. Entendre ce genre de comparaison en 2008 montre une méconnaissance du dossier ou une mauvaise foi à toute épreuve », indique, remonté, Fréderic Couchet de l'April. »
  • « Vente liée : les industriels font de la résistance » (Le Monde Informatique)
    « Deux voies ont été évoquées : le remboursement et l'optionalité. Dans le premier cas, le consommateur achète un ordinateur sur lequel OS et logiciels sont pré-installés puis se tourne vers le distributeur pour se les faire rembourser. Dans l'autre, la machine est livrée avec des codes d'activation enfermés dans une enveloppe scellée ; l'acquéreur a donc le choix des logiciels qu'il utilisera. Cette solution obtient les faveurs de l'April car « elle poserait le moins de problèmes au consommateur », explique Jérémy Monnet, l'administrateur de l'association de promotion du logiciel libre. »
    « Les industriels, en revanche, ne voient pas les choses du même oeil. Lors de la consultation organisée hier, les fabricants ont en effet botté en touche, estimant que ce concept d'optionalité était évoqué trop prématurément. « Ils se sont retranchés derrière des arguments fallacieux en prétextant qu'ils ne savaient pas que l'optionalité constituait une piste de réflexion et en réclamant du temps pour l'étudier », souligne Jérémy Monnet. »
    [...]
    « Environ 50 procédures initiées par le groupe Racketiciel de l'Aful sont en cours. Dans un mois, on passe aux assignations : on va ainsi occuper des places dans les tribunaux au détriment de femmes battues ou d'autres citoyens attendant qu'un litige important soit jugé», menace l'April. »
  • Vente liée : les discussions entre constructeurs et consommateurs dans l'impasse (VNU Net)
    « 'Les constructeurs et distributeurs n'ont cessé de se renvoyer la balle', résume Frédéric Couchet, délégué général de l'April (Association de promotion et de défense du logiciel libre). »
    [...]
    « La balle est donc dans le camp des constructeurs et distributeurs, analyse Frédéric Couchet qui avoue sa déception. 'Nous nous attendions à une discussion de fond qui n'a pas eu lieu', avance le porte-parole de l'April. 'Certes, il y a la menace d'une application législative mais son efficacité dépendra de Luc Chatel. Si c'est le député qui montre ses convictions, je suis plutôt optimiste. Si c'est le Secrétaire d'Etat, je crains le pire.' Frédéric Couchet fait référence au revirement du ministre qui en 2005, en tant que député défendait la lisibilité des prix affichés, pour estimer, en tant que ministre, inopportun de légiférer sur la question. »
  • Dialogue de sourds sur les ventes liées PC-logiciels
  • Vente liée OS / PC : un chemin semé d'embûches ? (Clubic)
    « Frédéric Couchet, délégué général de l'April, fait remarquer que le remboursement a ceci d'intéressant pour les distributeurs, fabricants et éditeurs de logiciels que bien souvent, les consommateurs n'usent pas de la possibilité qui leur est offerte, tant cette dernière est fastidieuse. « Chez certains fabricants, il faut renvoyer son ordinateur pour pouvoir se faire rembourser les logiciels », explique-t-il. « Il est regrettable par ailleurs que certains acteurs, tels qu'HP, continuent de nier la réalité de la vente liée en considérant l'ordinateur avec le système d'exploitation comme un seul et même produit. La comparaison avec la voiture et ses pneus est foireuse et fausse. Entendre ce genre de comparaison en 2008 montre une méconnaissance du dossier ou une mauvaise foi à toute épreuve ».
    [...]
    « L'April défend donc le principe d'optionnalité, qui consiste « à ne pas forcer le consommateur à acheter les logiciels préinstallés », mais à permettre au consommateurs de ne « payer que les éléments qu'il compte utiliser et repartir du magasin sans avoir à devoir se lancer ensuite dans une procédure de remboursement ». Une telle mesure pourrait par exemple passer par l'utilisation de codes d'activation remis lors de l'achat d'un ordinateur, en fonction des logiciels sélectionnés. »
    [...]
    « Deux voies seraient maintenant ouvertes : attendre que les tribunaux tranchent la question, à l'image de la récente condamnation de Darty à afficher les prix des logiciels intégrés aux ordinateurs vendus en magasin, ou miser sur une prise de décision législative de la part des pouvoirs publics. Dans les deux cas, il importera de définir clairement à qui incombent les responsabilités, et quelles pressions seront exercées sur les entreprises concernées pour s'assurer du bon respect des éventuelles mesures, souligne Frédéric Couchet. »