Des fonctionnaires francs-tireurs outrepassent le cadre politique fixé sur TAFTA ?

Paris, le 27 février 2015, communiqué de presse.

Malgré la position affichée du gouvernement français, des fonctionnaires français invitent les eurodéputés français à ne pas suivre la position de rejet du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) du rapporteur socialiste allemand Bernd Lange. L'April appelle les eurodéputés à ne pas céder à ces manipulations et renouvelle son appel à l'abandon des négociations par la Commission européenne et par l'ensemble des institutions impliquées dans ces négociations.

Dans sa réponse (juillet 2014, 7 pages) à la Consultation publique sur les modalités de la protection des investissements et des RDIE dans le cadre du TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership - Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement), l'April avait souligné que le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États était inacceptable : des cours d'arbitrage agissant en dehors de tout système judiciaire et avec des arbitres ayant un intérêt pécuniaire. Les investisseurs peuvent et doivent faire appel aux tribunaux nationaux généralistes, qui sont les seules juridictions habilitées auxquelles s'adresser. De plus, le mécanisme proposé par le RDIE risque de freiner les tentatives de réglementation par les gouvernements, voire de stopper toute nouvelle réglementation d’intérêt général. Et, dans sa note de synthèse sur TAFTA, l'April explique que le mécanisme est intrinsèquement en faveur des investisseurs et va à l'encontre des droits des citoyens.

Malgré l'opposition affichée de Matthias Fekl, secrétaire d'État au Commerce extérieur, des fonctionnaires français agissent en coulisses pour éviter le rejet du mécanisme de RDIE dans TTIP. C'est le sens d'une note d'analyse du SGAE (Secrétariat Général aux Affaires Européennes) adressée aux eurodéputés français (voir également la réaction du Collectif Stop TAFTA). Contacté par Mediapart, Matthias Fekl indique que « Cette note n'a été ni vue, ni validée » et qu'« elle ne reflète pas la position du gouvernement ». L'April prend acte de ce recadrage mais ne peut s'empêcher de craindre que cette note du SGAE ne reflète une possible division au sein du gouvernement.

« Comme pour ACTA, il est intolérable que des mesures menaçant les libertés fondamentales soient négociées par des hauts fonctionnaires agissant de leur propre chef. Si ces fonctionnaires ont réellement agit de leur propre initiative, le gouvernement doit prendre des sanctions » a déclaré Frédéric Couchet, délégué général de l'April.

La plupart des traités type TTIP/CETA couvrent de nombreux sujets, parmi lesquels figure celui de la soi-disant "propriété intellectuelle"1. Le droit d'auteur et le droit des brevets sont ainsi directement concernés. La sacralisation des DRM, ou menottes numériques, pourrait, de cette façon, être mise en place par le biais de ce texte, mais aussi la légalisation forcée des brevets logiciels.

C'est pourquoi l'April se mobilise contre TAFTA, mais également contre tous les accords commerciaux internationaux qui remettent en cause le fonctionnement démocratique et la protection des droits de l'homme. Nous appelons les eurodéputés français à résister à une telle manipulation au cours des prochaines semaines.

L'April dénonce l'attitude des fonctionnaires français et renouvelle son appel à l'abandon des négociations par la Commission européenne et par l'ensemble des institutions impliquées dans ces négociations.

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