L'école selon Microsoft : comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer l'éducation privatrice et fermée
Paris, le 7 novembre 2013. Communiqué de presse.
Deux ans après la convocation d'une centaine d'inspecteurs de l'Éducation nationale au siège de Microsoft France, l'April, Framasoft, le CNLL, SavoirsCom1 et l'Aful s'étonnent d'une nouvelle entorse à la neutralité scolaire et à l'intérêt du service public d'éducation.
Le 19 novembre 2013, plusieurs responsables de l'Éducation nationale se déplacent au siège de la société Microsoft1. Michel Pérez, Inspecteur général de l'Éducation nationale, Catherine Becchetti-Bizot, Inspectrice générale, Directrice du Comité Stratégique pour le Numérique à l‘École ainsi que des représentations des associations de collectivités viennent découvrir une étude coordonnée par Ludovia Magazine, en association avec Microsoft, Intel et SFR2.
Le titre de l'étude se veut neutre : « Investissement des collectivités en matière de numérique à l'école ». Le dispositif de communication ne l'est pas. Par leur présence à la table ronde organisée par Microsoft, les Inspecteurs généraux légitiment l'appropriation de l'Éducation nationale par une société privée. Les signataires de ce communiqué dénoncent fermement cette nouvelle entorse à la neutralité scolaire et à la mission de service public de l'éducation nationale.
Les collectivités territoriales souhaitent-elles vraiment favoriser l'exploitation commerciale de l'école par quelques grandes sociétés pour lesquelles l'éducation est exclusivement un marché captif ?
Ce n'est pas la première fois que des responsables de l'Éducation nationale se déplacent au siège de la société Microsoft. Lors du salon Éducatec-Éducatice 2011, les inspecteurs de l'Éducation nationale chargés de mission nouvelles technologies (IEN-TICE) s'étaient vu convoqués par leur hiérarchie pour tenir leur journée annuelle au siège de la société Microsoft. L'April et Framasoft avaient déjà dénoncé «une véritable entorse à la neutralité scolaire et vivement regretté que les programmes de ces journées ne mentionnaient pas les logiciels et ressources libres3. Malgré la circulaire du premier ministre « Pour l'usage des logiciels libres dans l'administration »4 l'histoire se répète.
Ce n'est pas non plus qu'un accident de parcours. Les services de l'Éducation nationale envoient depuis plusieurs mois des signaux inquiétants. Le rapport de l'Inspection générale sur « La structuration de la filière du numérique éducatif : un enjeu pédagogique et industriel »5 est très peu documenté sur les logiciels et ressources libres ou, au mieux minimise leur apport. Et le rapport n'aborde que très succinctement l'une des dispositions importantes du texte de loi pour la refondation de l'école qui recommande : « l'incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de logiciels libres et de contenus aux formats ouverts »6. Les signataires de ce communiqué auraient pu, avec d'autres, aider les rédacteurs dans leur travail afin d'arriver à un rapport plus exhaustif.
« L'école ne doit pas être un marché captif des éditeurs privateurs du numérique. L'école que nous appelons de nos vœux, ne doit pas enseigner « avec » le numérique sur des produits privateurs dans une approche de type B2i qui forme avant tout des consommateurs passifs » déclare Rémi Boulle, vice-président de l'April, en charge du groupe de travail Éducation. Dans la continuité des principes hérités du siècle des Lumières, elle doit former des futurs citoyens responsables, capables de réfléchir de façon libre, indépendante voire les créateurs de demain.
Stefane Fermigier, Vice-Président du CNLL, rappelle pour sa part « La place du logiciel libre dans le système éducatif français est un enjeu majeur pour la compétitivité de notre économie. Pour continuer d'être à sa place de leader mondial du logiciel libre, la France doit aussi se doter d'une politique éducative forte dans ce domaine, en privilégiant l'usage d'outils pédagogiques libres, en fondant l'apprentissage du numérique à l'École sur les logiciels libres, et en enseignant les technologies et méthodologies propres au logiciel libre dans les filières informatiques et scientifiques ».
Enseigner « avec » le « numérique » dans toutes les disciplines nécessiterait a minima :
- un véritable enseignement de la science informatique ;
- d'authentiques cours de technologie qui ne seraient plus limités, en collège, à la seule étude d'objets physiques dans lesquels l'informatique qu'ils pourraient incorporer est ignorée et traitée comme une boîte noire ;
- un authentique apprentissage raisonné des logiciels et de l'internet qui n'est actuellement enseigné nulle part ;
- un enseignement des technologies et méthodologies propres au logiciel libre dans les filières scientifiques et informatiques ;
- l'utilisation de logiciels libres et la diffusion sous licence libre des ressources utilisées dans le service public de l'éducation ;
- une réflexion opérationnelle (approfondie) sur les contenus de cet enseignement, dès l'école primaire.
C'est également enseigner l'apprentissage du travail collaboratif, incompatible avec des ressources privatrices DRMisées, des formats de fichiers non interopérables, des licences qui ne permettent pas la libre circulation et le libre partage des savoirs. L'École ne doit plus être contrainte dans des systèmes privateurs et fermés.
Nous nous tenons à la disposition de l'Inspection générale et de Mme Catherine Becchetti-Bizot pour toute information complémentaire sur les logiciels et ressources libres pour l'éducation et leur souhaitons un riche salon Éducatec-Éducatice.
À propos de l'April
Pionnière du logiciel libre en France, l'April est depuis 1996 un acteur majeur de la démocratisation et de la diffusion du Logiciel Libre et des standards ouverts auprès du grand public, des professionnels et des institutions dans l'espace francophone. Elle veille aussi, à l'ère du numérique, à sensibiliser l'opinion sur les dangers d'une appropriation exclusive de l'information et du savoir par des intérêts privés.
L'association est constituée de plus de 3 600 membres utilisateurs et producteurs de logiciels libres.
Pour plus d'informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l'adresse suivante : http://www.april.org/, nous contacter par téléphone au +33 1 78 76 92 80 ou par notre formulaire de contact.
Contacts presse :
Rémi Boulle, vice-président de l'April, en charge du groupe de travail Éducation, rboulle@april.org, 06 05 03 32 30
Frédéric Couchet, délégué général, fcouchet@april.org +33 6 60 68 89 31
Jeanne Tadeusz, responsable affaires publiques, jtadeusz@april.org +33 1 78 76 92 82
À propos de Framasoft
Issu du monde éducatif, Framasoft est un réseau d’éducation populaire consacré principalement au logiciel libre et s’organise en trois axes sur un mode collaboratif : promotion, diffusion et développement de logiciels libres, enrichissement de la culture libre et offre de services libres en ligne.
Pour plus d’informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l’adresse suivante : http://www.framasoft.org/ et nous contacter par notre formulaire de contact.
Contact presse :
Alexis Kauffmann, fondateur et chargé de mission, aka@framasoft.org +33 6 95 01 04 55
À propos du CNLL
Le Conseil National du Logiciel Libre est l'instance représentative, au niveau national, des associations et groupements d'entreprises du logiciel libre en France. Le CNLL représente 13 associations et groupements, et par leur intermédiaire plus de 300 entreprises françaises spécialisées ou avec une activité significative dans le logiciel libre.
Le CNLL a pour principale mission de représenter l'écosystème du logiciel libre auprès des pouvoirs publics et des organisations nationales et internationales existantes.
Contact Presse : Amélie Vaysse, chargée de communication, relations presse. 01 41 40 11 42 – info@cnll.fr
À propos de SavoirsCom1
SavoirsCom1 est un collectif qui s"intéresse aux politiques des biens communs de la connaissance. Son action vise à faire en sorte que les politiques publiques favorisent la création, la diffusion et la mise en partage de biens communs informationnels. SavoirsCom1 défend lespositions exprimées dans son Manifeste.
Contact : savoirscom1@gmail.com ou Lionel Maurel, co-fondateur du collectif SavoirsCom1 calimaq@gmail.com
À propos de l'Aful
Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres, l'AFUL a pour principal objectif de promouvoir les logiciels libres ainsi que l'utilisation des standards ouverts. Ses membres, utilisateurs, professionnels du logiciel libre, entreprises ainsi que d'autres associations, sont issus d'une dizaine de pays ou de régions francophones (France, Belgique, Suisse, Afrique francophone, Québec).
Interlocuteur de nombreux médias, l'AFUL est présente sur nombre de salons, conférences et rencontres. Elle agit notamment activement contre la vente liée (site Non aux Racketiciels, comparatif bons-vendeurs-ordinateurs.info et bons-constructeurs-ordinateurs.info), pour l'interopérabilité (membre de l'AFNOR, participation aux référentiels d'interopérabilité et d'accessibilité de la DGME, site formats-ouverts.org, etc.), intervient sur les problématiques du droit d'auteur ainsi que pour la promotion de l'utilisation de logiciels et ressources pédagogiques libres pour l'éducation entendue au sens large.
Contacts presse :
- Jean-Yves Jeannas, vice-président Éducation de l'AFUL, jean-yves.jeannas@aful.org
- Laurent Séguin, président de l'AFUL, laurent.seguin@aful.org +33 (0)6 63 94 87 16
- Relations presse - AFUL : presse@aful.org
- 1. Le Numérique à l'École : un enjeu partagé
- 2. Lancement de la deuxième édition de l’étude sur le numérique éducatif dans les collectivités territoriales
- 3. Les inspecteurs de l'éducation nationale convoqués chez Microsoft
- 4. Circulaire Ayrault sur le bon usage des logiciels libres dans l'administration française
- 5. Michel Pérez est le coordonnateur du rapport « La structuration de la filière du numérique éducatif : un enjeu pédagogique et industriel », 24/09/2013
- 6. Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République publiée au Journal Officiel le mardi 9 juillet 2013 : « L'incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de logiciels libres et de contenus aux formats ouverts ».