La fin du brevet logiciel, c'est maintenant

Paris, le 16 mai 2012. Communiqué de presse.

Les 30 et 31 mai 2012 aura lieu le premier Conseil compétitivité auquel participera le gouvernement de François Hollande1. L'April appelle donc le président à profiter de cette occasion pour agir contre les brevets logiciels et mettre sur le tapis les défauts et problèmes du projet actuel de brevet unitaire.

Loin des annonces de la Commission européenne le présentant comme une réforme permettant de « stimuler l'innovation »2, le projet de brevet unitaire est de plus en plus critiqué pour son insécurité juridique et pour son absence de respect des institutions européennes. Juristes3, grandes entreprises4 ou encore la société civile ont en effet pointé du doigt les dangers du projet, qui donne la plupart des compétences en termes de délivrance des brevets à l'Office européen des brevets (OEB), dont les dérives en faveur des brevets logiciels sont dénoncées depuis longtemps par l'April. De tels brevets, loin de protéger l'innovation, représentent en effet des armes de guerre économique à la disposition de quelques grandes entreprises, qui empêchent ainsi d'autres acteurs, dont le logiciel libre, d'innover et de proposer leurs produits5. De plus, l'organisation de la nouvelle cour spécialisée des brevets pourrait entraîner de nouvelles dérives, car elle ne serait soumise à aucun contrôle d'un tribunal indépendant, notamment en ce qui concerne ce qui peut ou non être breveté : un petit nombre de juristes spécialisés dans les brevets serait donc aux commandes de l'ensemble du système des brevets en Europe. L'Union européenne abandonnerait ainsi ses compétences en droit des brevets à un organisme extra-communautaire, sans contrôle démocratique.

Malgré l'insistance de nombreux acteurs, dont l'April, sur ces dangers, la Commission comme le Conseil sont restés sourds aux critiques6, alors même que des solutions existent pour qu'un brevet unitaire respectueux du droit de l'Union puisse voir le jour. Un contrôle juridique par la Cour de justice de l'Union européenne serait un moyen simple d'assurer un contrôle minimal et l'application du droit européen. Les instances européennes, dont le gouvernement français fait partie, doivent également se saisir du droit des brevets et redéfinir ce qui est brevetable et ce qui ne l'est pas. Ce constat est d'ailleurs partagé par Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des PME, de l'innovation et de l'économie numérique, qui s'était clairement opposée aux brevets logiciels lors de la campagne pour l'élection présidentielle et avait pointé les dangers du projet actuel de brevet unitaire dans sa réponse au questionnaire Candidats.fr de l'April : « les instances de l'Union européenne, qui est l’échelon où se joue une grande partie de la politique d’innovation en Europe, devraient se voir reconnaître une place plus importante. ».

« Avec ce premier Conseil Compétitivité de l'Union européenne, le président et le gouvernement ont une occasion unique d'agir sur les brevets logiciels et sur une insécurité juridique qui menace le logiciel libre et de nombreuses entreprises, notamment des PME et PMI, en les empêchant d'innover », déclare Lionel Allorge, président de l'April. « Une remise à plat du système des brevets en Europe est essentielle pour éviter une situation semblable à celle des États-Unis où des millions de dollars sont perdus par un droit des brevets hors de contrôle et pour assurer le contrôle démocratique du système des brevets. »

L'April appelle donc François Hollande et le nouveau gouvernement à agir contre les brevets logiciels en améliorant le projet de brevet unitaire actuellement discuté dans les institutions européennes pour qu'il garantisse l'équilibre des pouvoirs et la sécurité juridique, et se tient à leur disposition.

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