Rapport de Julia Reda sur la révision de la directive droit d'auteur : vers un droit à interopérer avec les DRM ?

Paris, le 28 janvier 2015, communiqué de presse.

Le 20 janvier 2015, l'eurodéputée Julia Reda a présenté devant la commission des affaires juridiques (JURI) du Parlement européen son rapport sur l’adaptation de la directive sur le droit d’auteur (12 pages, anglais)1. Ce rapport est un premier pas important pour la révision des règles européennes en matière de droit d'auteur. L'eurodéputée propose notamment de mettre en place un droit à l'interopérabilité avec les DRM.

Julia Reda livre un plaidoyer pour un rééquilibrage de la législation européenne en faveur des droits du public et de l'accès aux œuvres, maintenant et à l'avenir.

Sur la question des DRM, son rapport ne remet pas en cause leur protection juridique (imposée par divers traités internationaux) mais propose de l'amender, afin notamment de garantir l'exercice effectif des exceptions et l'accès au domaine public, "que les mesures techniques de protection ne devraient pas empêcher" (point 23 de son rapport2).

De plus, en faisant dépendre la protection juridique des DRM de la publication de leur code source ou des spécifications d'interfaces, elle souhaite créer un véritable droit à interopérer avec les mesures techniques (point 24 de son rapport3). Pour être effective cette proposition doit toutefois être complétée : d'un point de vue technique, c'est l'ensemble des informations essentielles à l'interopérabilité, et en particulier les clés de chiffrement, qui doit être mis à disposition pour l'implémentation de solutions interopérables ; et d'un point de vue juridique, le droit de publier le code source et la documentation technique d'un logiciel indépendant interopérant avec un DRM doit être garanti.

Dans le rapport, l'interopérabilité est abordée uniquement dans le contexte des DRM, mais il ne faut pas oublier les restrictions imposées sur l'ingénierie inverse qui n'est actuellement qu'une exception de la directive 2009/24/CE sur la protection juridique des programmes d'ordinateur4. L'April appelle à sanctuariser l'interopérabilité, seul antidote à la segmentation du marché, la captation de la clientèle et l'obsolescence programmée des œuvres numériques.

« Nous saluons l'orientation de ce rapport qui présente des pistes concrètes de réforme du droit d'auteur. Il faudra toutefois les consolider et être vigilant lors de leur transposition juridique » a déclaré Frédéric Couchet, délégué général de l'April.

Cette première version du rapport de Julia peut être amendée par les autres eurodéputés membres de la commission des affaires juridiques (JURI) jusqu'à fin février. L'April encourage les députés à prendre en compte ses remarques pour amender les dispositions concernant les DRM.

Pour l'analyse des autres parties du rapport Reda, voir le communiqué de La Quadrature du Net Réforme du droit d'auteur : le Parlement européen doit suivre le rapport Reda, le communiqué de l'Open Forum Europe OFE welcomes the European Parliament draft report kicking off the EU Copyright debate, l'article de Next INpact Au Parlement européen, les premières pistes pour déradicaliser le droit d’auteur et l'article de Numerama droit d'auteur : les propositions de l'eurodéputée pirate Julia Reda.

  • 1. La directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information (également appelée EUCD pour European Union copyright directive)
  • 2. 23. Stresses that the effective exercise of exceptions or limitations, and access to content that is not subject to copyright or related rights protection, should not be hindered by technological measures;
  • 3. 24. Recommends making legal protection against the circumvention of any effective technological measures conditional upon the publication of the source code or the interface specification, in order to secure the integrity of devices on which technological protections are employed and to ease interoperability; in particular, when the circumvention of technological measures is allowed, technological means to achieve such authorised circumvention must be available
  • 4. Voir à ce sujet notre réponse à la consultation de la Commission européene de mars 2014.