Protection des données sur Internet - Le Grand Direct - Radio Djang'O

Cédric Jeanneret - Stéphane Koch - Claudia - Fabien

Titre : Protection des données sur Internet
Intervenants : Cédric Jeanneret - Stéphane Koch - Claudia Pessina - Fabien Honsberger
Lieu : Le Grand Direct - Radio Djang'O
Date : mars 2018
Durée : 21 min
Écouter ou télécharger le podcast
Licence de la transcription : Verbatim
Illustration : Data Ball - Gerd Altmann - Wikimedia Commons. Licence Creative Commons CC0 1.0 Universal Public Domain Dedication.
NB : transcription réalisée par nos soins. Les positions exprimées sont celles des intervenants et ne rejoignent pas forcément celles de l'April.

Transcription

Voix off : Radio Djang'O – Le Grand Direct – 18-19 heures

Fabien : Bonsoir à toutes et bonsoir à tous. Soyez les bienvenus pour votre heure de vie lausannoise dans ce Grand Direct de Radio Djang'O. Je suis très heureux de vous retrouver pour ce nouveau numéro ce soir. Au programme nous allons commencer avec toi Claudia. Bonsoir.

Claudia : Bonsoir.

Stéphane Koch : Nous allons parler ensemble de protection de données numériques. Je fais référence, bien sûr, au récent vol de quelque cinquante millions de données, excusez du peu, cinquante millions de données d’utilisateurs ; c’était sur Facebook.

Claudia : Oui. On en parlera ce soir. On aura deux invités : Cédric Jeanneret, militant pour les droits numériques et Stéphane Koch, consultant en stratégie numérique et réseaux sociaux. On va pouvoir parler de cette tempête qui a envahi Facebook, mais on va pouvoir aussi avoir des réponses à plusieurs questions qu’on se pose aujourd’hui dans les médias. Est-ce que Facebook est réellement une menace ? Comment nous protéger, protéger nos données personnelles ? Voilà les question, vous prenez un papier, un stylo et puis vous êtes prêt à prendre les notes. C'est tout de suite dans quelques instants.

[De 1 min 20 à 2 min 42, présentation des autres parties de l'émission]

Fabien : Je suis Fabien, je vous accompagne jusqu’à 19 heures. Bienvenue à vous dans ce Grand Direct.

Voix off : Radio Djang'O - Vivre à Lausanne.

Fabien : Et on ouvre cette émission avec un sujet brûlant d’actualité et cette action Delete Facebook, suite au scandale qui a investi la plus célèbre plateforme du monde. Une campagne de désabonnement massif s’est engagée sur les réseaux sociaux. Tout a commencé après les révélations récentes de la presse anglo-saxonne selon lesquelles Facebook s’est fait piéger par ses propres données. Au cœur du scandale la société Cambridge Analytica qui aurait récolté des informations sur les utilisateurs et utilisatrices de Facebook, à leur insu, dans l’objectif d’influencer la campagne présidentielle de Donald Trump aux États-Unis.

Voix de Mark Zuckerberg : This was a major breach of trust and I’m really sorry that this happened. We have a basic esponsibility to protect people's data and if we can't do that we don't deserve to have the opportunity to serve people. So our responsability now is to make sure that this doesn't happen again.

Fabien : Et on en parle ce soir avec toi Claudia.

Claudia : Oui bonjour. C’était le patron de Facebook. Mark Zuckerberg, le 21 mars, a brisé le silence en s’excusant auprès de deux milliards d’utilisateurs et utilisatrices qui ont été volés, comme plusieurs médias ont dit, de leurs données personnelles. Le patron de Facebook a promis d’améliorer la confidentialité des données des usagers, usagères, mais, malgré cela, la confiance est brisée. Une campagne massive de désabonnement et différentes questions. Est-ce que Facebook est une menace ? Quels sont les risques réels ? Quelles données sont-elles aspirées par le réseau social avec leur autorisation ou non ? Pour quel usage politique, commercial, sociétal ? Comment supprimer nos données ?

Fabien : Oui, toutes des questions essentielles et existentielles qu’on va aborder ce soir et auxquelles on va pouvoir, j’espère, trouver des réponses avec nos deux invités, des experts de la région. Tout d’abord Cédric Jeanneret, bonsoir.

Cédric Jeanneret : Bonsoir.

Fabien : Bienvenue à vous sur Radio Djang'O. Vous êtes militant pour les droits numériques et fondateur du site internet www.ethack.org1. Et vous, Stéphane Koch, bonsoir.

Stéphane Koch : Bonsoir.

Fabien : Vous êtes consultant en stratégie numérique et réseaux sociaux. Ce sont des questions qui vous concernent, sur lesquelles vous vous êtes plongé. On va en discuter ce soir.

Claudia : On a plusieurs questions à vous poser. Je vais commencer avec une. Par rapport à ce que Facebook a déclaré sur les médias au cours des derniers jours, il a déclaré être scandalisé d’avoir été trompé par l’entreprise anglaise Cambridge Analytica, mais est-ce que la plus grande plateforme du monde se fait réellement piéger ? Comment c’est possible ? Qui veut répondre ?

Stéphane Koch : Premièrement, je crois qu’il n’y a pas de données qui ont été volées, ça il faut aussi le dire, c’est un peu une exagération des médias et c’est peut-être le problème, c’est que, finalement, on n’a rien eu besoin de voler. Et je ne pense pas que Facebook soit innocent là-dedans. Je pense qu’ils sont conscients que ce qu’ils ont mis à disposition et les autorisations, finalement, qu’ils offrent à ceux qui créent des applications externes donc qui sont connectés à Facebook, eh bien permettent que la situation qui est arhttps://www.django.fm/rivée puisse arriver. Donc maintenant, qu’ils aient été surpris et autres, c’est un petit peu étonnant !

Fabien : Est-ce que les utilisateurs ont vraiment été volés comme l’ont déclaré certains médias ? Cédric Jeanneret.

Cédric Jeanneret : Non, pas du tout. En fait, les utilisateurs ont juste fourni leur matériel en acceptant les conditions générales d’utilisation, comme d’habitude, et ça a juste été exploité jusque, on va dire, l’extrême, actuellement, de ce que l’on peut faire avec Facebook. Il n’y a pas eu de vol de données. C’est juste une exploitation des données qui sont présentes et voilà !

Fabien : Qu’on comprenne bien, réexpliquez-nous brièvement. Nous, on fournit nos données à Facebook, pour n’en citer qu’un. En signant les conditions générales, nous acceptons qu’ils stockent les données et ce sont eux qui ont fourni les données à un tiers.

Cédric Jeanneret : Tout à fait. C’est même pire que ça ! On accepte que les données qu’on fournit à la plateforme exploite ces données et les transmette à un tiers. Donc forcément, ces données-là sont dans la nature, sous le contrôle de la plateforme, plus ou moins, et ça a été juste exploité comme ça.

Fabien : Et dans le cas présent de Cambridge Analytica, ce sont eux qui sont venus se servir ? Stéphane Koch.

Stéphane Koch : Oui, dans une certaine mesure. Il y a deux aspects. Il y a le fait que Facebook permet un accès aux données des utilisateurs sous forme de profilage, pour communiquer quelque chose ou pour, potentiellement, vendre quelque chose. Mais ça veut dire que je peux faire une campagne sur Facebook pour essayer de faire que des gens achètent mes produits ou je peux communiquer une information pour sensibiliser les gens sur une cause. Et on va utiliser le même profilage de données. On n’a pas les données en main, mais on a la possibilité de faire que Facebook touche des personnes qu’on arrive à profiler à travers le système de données.

Et puis il y a les données extérieures, celles qui sont collectées par des applications, et là on est dans le cas, entre autres, de Cambridge Analytica, où les applications vont permettre d’extraire beaucoup de données par rapport à ce que Facebook permet et toutes les permissions que ces applications vont solliciter auprès des utilisateurs qui, dans la grande majorité, ne les vérifient pas.

Fabien : Vous parlez d’applications. Qu’est-ce qu’il y a comme exemples d'applications qui vont se servir de nos données ?

Stéphane Koch : Celles que Cambridge Analytica a mises en place, par exemple le test de psychologie. Il y a toutes les applications qui vous disent : « Voulez-vous vous connecter avec votre compte Facebook ? », par exemple.

Fabien : D’accord. Donc ça ce sont des applications qui vont se servir de nos données.

Stéphane Koch : Voilà. Si vous avez une montre Garmin, si vous êtes sur Spotify et que vous vous connectez avec votre compte Facebook, à chaque fois on vous dit : « Est-ce que vous acceptez de transmettre ? » Normalement il faudrait vérifier tout ce qu’on accepte de transmettre et, là-dedans, il y a tout un faisceau de données, certaines sur lesquelles on peut agir et d’autres sur lesquelles on n’a pas de contrôle.

Claudia : Dans le cas Cambridge Analytica, eh bien c'est un test psychologique, apparemment ça devait simplement, entre guillemets « nourrir une recherche universitaire » et puis, toujours selon les médias, tout ce qui est sorti, c’est devenu une arme politique redoutable. Mais est-ce que c’est un cas unique ? Est-ce qu’on est à l’abri en Suisse, d’un cas comme celui de Cambridge Analytica ?

Stéphane Koch : Cas unique, c’est un peu compliqué de savoir, je pense. Après, si la Suisse est à l’abri de ce genre de choses, non ! Je veux dire, ce genre de réseau c’est international. N’importe qui peut commencer à piocher dans ses data, à piocher dans ses profils et commencer à faire des campagnes de communication quelconque, que ce soit au sein de la Suisse, que ce soit en France, que ce soit en Russie, que ce soit aux États-Unis ou n’importe où.

Et puis il n’y a pas que Trump qui l’a utilisé. Obama l’avait utilisé aussi, il ne faut pas oublier. Et puis maintenant, il y a plein de gens qui sont à l’abri. Ce sont des gens qui sont conscients, qui ont fait l’effort d’essayer de comprendre l’environnement dans lequel ils se trouvent, de comprendre les systèmes de données avec lesquels ils collaborent. Oui, ce sont des entreprises privées, cotées en bourse, elles ne sont pas altruistes. Si Facebook fait 40 milliards de chiffre d’affaires dont 20 milliards de bénéfices, c’est aussi qu’il « redistribue » entre guillemets 20 milliards ; ils emploient 25 000 personnes, en tout cas fin 2017. Maintenant voilà ! Il n’y a rien d’innocent. C’est une société qui est là pour faire de l’argent ; elle fait de l’argent avec nos données. Donc leur système c’est de prendre un maximum de nos données. Clairement on peut leur reprocher un manque de transparence sur la manière de faire, beaucoup des démarches sont critiquables. Mais il y en a un certain nombre sur lesquelles ont peut agir si on prend juste le temps de parcourir les paramètres de configuration ; rien que ça ! On peut faire quand même un certain nombre de choses ! On ne peut pas tout faire ! Mais aujourd’hui, par exemple, configurer sa confidentialité c’est un acte d’activisme. C’est-à-dire, si tout le monde le fait, eh bien c’est un message qui est envoyé à ces sociétés. On parle de Facebook, mais il n’y pas que Facebook ; Snapchat, d’autres.

Claudia : WhatsApp ; ça fait partie de Facebook.

Stéphane Koch : WhatsApp, Instagram et Messenger font partie de Facebook, mais tous les autres, que ce soit du YouTube, tous les autres réseaux sociaux ont le même modèle économique derrière, donc il ne faut pas le négliger. Même Swisscom a ce modèle économique. Swisscom, tout d’un coup, a ouvert tous les canaux de données, ils vous prennent l’empreinte vocale, ils vous prennent les données de géolocalisation, ils vous prennent les données d’échange avec la Swisscom Box, etc., et c’est à l’utilisateur de revenir sur ses settings pour enlever ça. C’est juste inadmissible ! Alors oui on peut critiquer Facebook, des sociétés aux États-Unis et puis demander que le report juridique soit en Suisse, mais quand on ne fait rien pour les sociétés en Suisse, ça soulève quand même quelques questions

Claudia : Mais il y a aussi des lois. Je vais poser la question surtout à Cédric, des lois qui protègent la sphère privée des citoyens et citoyennes. Je pense à la loi sur la protection des données personnelles. Cette loi, déjà si on peut en parler un petit peu plus, et puis quel est le lien entre cette loi et le cas de Facebook aussi ?

Cédric Jeanneret : Le problème de la loi en Suisse c’est qu’elle est en Suisse ! Donc forcément, quand on a une société étrangère qui exploite des données de Suisse, il y a tout un processus juridique qu’il faut mettre en place pour commencer : passer par l’Irlande pour Facebook et ensuite, potentiellement, il y a la Californie toujours pour Facebook, c’est assez long ! La Suisse se gargarise depuis des années du fait qu’on ait une de meilleures lois pour la protection des données, mais, en fait, d’ici le mois de mai, ça sera totalement faux. On sera moins protégé qu’un Français ou qu’un Roumain. Donc au final, la Suisse est totalement en retard là-dessus.

Fabien : Qu’est-ce qui va changer au mois de mai ?

Cédric Jeanneret : Au niveau européen, il y a une loi, je ne sais plus maintenant l’acronyme.

Stéphane Koch : RGPD, la loi globale européenne sur la protection des données.[Règlement général sur la protection des données].

Cédric Jeanneret : Voilà, merci Stéphane.

Stéphane Koch : Règlement européen, pardon !

Fabien : Qui va corriger pour les Européens et pas pour les Suisses ?

Cédric Jeanneret : Exactement parce qu’on n’est pas dans l’Union européenne, donc la Suisse va un peu, je pense, adapter sa loi. Il y a la révision de la loi sur la protection des données qui se fait en août. L’application, on ne sait pas ! Voilà ! Donc autant pour le fort des données personnelles en Suisse on en est très, très loin.

Claudia : Donc quels sont nos droits en tant qu’utilisateurs-utilisatrices ? Il y a des responsabilités, mais il y a aussi des droits, en Suisse ou au niveau européen.

Cédric Jeanneret : Oui, il y a des droits, bien sûr. On peut lancer des procédures, mais, comme dit, il faut passer par des procédures à l’étranger et, en tant que citoyen suisse, on va dire, c’est un peu compliqué !

Stéphane Koch : Mais il y une volonté politique de ne pas protéger correctement les données. C’est clair ! Quand vous voyez que la CNIL, donc l’organisme de protection des données en France, il y a à peu près 200 personnes qui bossent là-bas. En Suisse, on a une équipe qui fait ce qu’elle peut faire, mais qui est extrêmement réduite. C’est un peu comme le contrôle, je ne sais, sur le travail au noir et tout ça : mettez peu d’inspecteurs et puis vous aurez peu de contrôles malgré les lois qui sont en cours. Finalement, si on met peu de ressources humaines au niveau du Préposé fédéral à la protection des données à la transparence, eh bien on n’arrivera pas à protéger les données. Et puis c’est un peu une volonté derrière, parce qu’on est toujours dans le principe « il ne faut pas embêter les entreprises », alors qu’aujourd’hui, c’est un vrai outil de communication de protéger les données personnelles.

Fabien : Stéphane Koch il faudrait, selon vous, augmenter cette équipe de personnes qui contrôle, qui vérifie, qui est là pour nous, pour aider les Suisses ?

Stéphane Koch : Oui, pas seulement qui contrôle, qui vérifie, qui met à disposition aussi du citoyen des éléments de compréhension pour l’aider et l’accompagner. Parce qu’on ne peut pas aller en arrière. Le Delete Facebook c’est un peu stupide, très sincèrement. Ça n’a peut-être pas pris en Suisse non plus, mais à quoi ça sert ? Il faut se « deleter » soi-même de la société ! Parce qu’on est dans une société qui est de plus en plus dématérialisée, qui est de plus en plus basée sur les données. Il n’y a pas que Facebook, mais il y a toutes les données, celles de l’Internet des objets, celles qui vont être bientôt de la domotique, celles qui sont bientôt des voitures connectées. J’entends. On ne pourra plus passer à côté de la donnée. Donc autant que le citoyen prenne ses responsabilités, qu’on puisse aussi lui donner les moyens de les prendre, c’est-à-dire qu’il puisse s’éduquer et devenir un citoyen conscient et un citoyen qui décide.

Fabien : Un citoyen qui décide voilà, c’est un petit peu la thématique qu’on aborde ce soir dans cette rubrique vivre à Lausanne. Voici un extrait de nos confrères de Vertigo de la RTS, c’était hier.

Voix off : À partir de 70 pages « likées » sur Facebook, il y a 95 % de chances que l’entreprise Cambridge Analytica devine votre couleur de peau ; 85 % de chances qu’elle devine votre orientation sexuelle ; à partir de 150 pages « likées », elle estime mieux vous connaître que vos enfants ; à partir de 300 pages « likées », elle estime mieux vous connaître que votre conjoint.

Fabien : Voici un extrait de Vertigo de la Radio Télévision Suisse diffusé hier. Donc on constate, après un certain nombre de like, qu’on peut entrer dans nos vies privées. Mais comment est-ce qu’on peut se protéger de cela ?

Claudia : Parce qu’on livre facilement nos données personnelles sur les réseaux sociaux : mon sport préféré, le nom de mes amis, les photos, tandis que si on a un inconnu qui va frapper à notre porte, eh bien on lui ferme la porte au nez, si on nous demande des choses qui concernent notre vie privée. Pourquoi ?

Stéphane Koch : Je crois que les démarches sont des fois assez simples. Que ce soit, je pense, pour Cédric ou moi, l’idée est de dire qu’on ne met en ligne que des choses qu’on peut assumer publiquement. Les réseaux sociaux sont, finalement, une représentation publique de nous ; on n’a pas nécessairement besoin d’y mettre sa vie privée. On a des messages privés, on a des systèmes de messagerie pour échanger des trucs privés qui fonctionnent très bien : on n’a pas besoin de tout mettre en ligne non plus. Maintenant, on peut aussi gérer des paramètres de confidentialité.

Par exemple, moi je fais des démonstrations dans mes cours, des fois dans des écoles, pour montrer avec quelques like comment je peux influencer le comportement de quelqu’un ou le choix final de quelqu’un. Facebook me permet, avec son moteur de recherche interne, d’identifier, par exemple, les femmes célibataires qui vivent à Genève et qui aiment aller au restaurant. Voilà. Je fais cette identification, je choisis ma cible et puis je regarde ses intérêts. Dans mon exemple, elle aime la lingerie d’Aubade, les produits de l’Occitane, elle aime aussi les macarons de Ladurée ; elle cherche peut-être un appartement, elle est allée à Brighton et puis elle va de temps en temps aux Terrasses de Genève. OK ! Qu’est-ce que je fais avec ça ? Eh bien je suis allé chercher des images de Brighton sur Google, que je vais mettre dans mon téléphone, les endroits branchés sur TripAdvisor ; ensuite, je vais aller chez Ladurée acheter quelques macarons, et puis je vais aller aux Terrasses de Genève. On va se rencontrer ; je vais lui offrir des macarons qu’elle va manger, forcément, et on va discuter comme ça et puis je vais dire « Ah ! Je reviens de Brighton ». Elle va dire : « Ah ! Mais moi aussi j’y suis allée ! » Et puis je vais montrer toutes les belles photos que j’ai prises là-bas, etc. Et de fil en aiguille, on va découvrir toute cette alchimie incroyable entre nous, basée sur cette rencontre, subite et imprévue. Et voilà !

Après je montre que, simplement, on peut gérer les paramètres de confidentialité de ses like sur Facebook ; on peut les restreindre en termes d’audience. Si on le fait, tout cela est impossible à faire. C’est juste une responsabilité de l’utilisateur, ce n’est pas plus compliqué que ça et il y a plein de gens, comme Cédric à travers son site ou à travers ses différentes actions, qui aident l’utilisateur à, quelque part, mieux comprendre ces environnements. Il y a des vulgarisateurs, il y a des gens qui vont donner de leur temps, de leur énergie, sans être forcément payés en retour toujours, pour faire un certain nombre de choses et les aider, quelque part, à mieux comprendre ces environnements.

Claudia : Je reprends ce slogan de l’entreprise Cambridge Analytica : « Les données sont le moteur de tout ce que nous faisons ». Mais pour éviter qu’une telle entreprise utilise nos données personnelles à notre insu, est-ce qu’effacer notre compte Facebook est suffisant ? N’est pas suffisant ? Est-ce que les données restent vraiment dans le réseau ? Pendant combien de temps ? Qu’est-ce qu’on fait ?

Fabien : Cédric Jeanneret.

Cédric Jeanneret : Ça ne sert à rien, en fait, de vouloir effacer ses donnés parce que OK, peut-être qu’elles seront effacées de Facebook, après un certain temps quand même ; ils sont obligés de le faire. Mais les données seront toujours exploitées quelque part ; il y aura toujours, peut-être, un Cambridge Analytica quelconque, qui aura toujours ces données-là parce qu’ils ne sont pas liés à Facebook, donc ils n’ont pas l’obligation de savoir que vous avez effacé votre compte. Non, ce qu’il faut faire, c’est voir le problème à la racine : est-ce que je publie ? Est-ce que j’ai vraiment besoin de publier ça ? Est-ce que c’est un besoin impérieux ? Est-ce que ça apporte quelque chose, en fait, au réseau social et à mes proches ? Est-ce que c’est vraiment important que je publie ça de manière publique ou bien est-ce que je peux plutôt passer par un truc plus confidentiel ? On parle de WhatsApp, on parle de Threema, on parle de Telegram, potentiellement. Enfin, il y a plein de vecteurs de communication qui existent et chacun est adapté à un type de contenu. Donc voilà ! Après si on ne veut pas se faire profiler de manière précise sur Facebook — bonne chance pour commencer—, mais juste réfléchir à ce qu’on publie. C’est tout !

Claudia : Mais peut-être pas toutes les personnes ! Je pense aussi aux adolescents, adolescentes, ils ne sont pas assez responsabilisés, éduqués. Il y a beaucoup d’informations qui sont mises sur le Net. On voit aussi des gamins ; à 9-10 ans, ils ont leur canal YouTube et puis ils ne savent pas qu’il y a un canal privé. On parle d’éducation, mais qu’est-ce qu’on peut faire ?

Stéphane Koch : J’entends. Il faut faire attention que les réseaux sociaux ne créent pas une sorte de nuage de fumée qui nous évite de voir des problèmes qui sont aussi à notre porte. Quand vous êtes avec des cartes fidélité, vous créez le même système que Facebook, quelque part, sur le comportement, le profilage. Moi je suis annonceur, je peux accéder à ces données de la même manière que pour Facebook. On ne va pas me donner les données, mais on va envoyer le mailing aux gens que j’aurais ciblés par mon profilage. Donc c’est à peu près la même chose. Les systèmes de paiement électronique, ce qu’on appelle la monnaie plastique, les jeunes aujourd’hui payent sans arrêt avec ça. Alors quand je paye avec une carte, je dis qui je suis, où je suis, à quelle heure j’y suis et ce que j’achète. Quand je paye avec du cash, je ne dis rien. Vous voyez ce que je veux dire ? Donc il y a tout ça, il y a tous ces systèmes. Quand on vous offre du Wi-fi dans un grand magasin, eh bien des fois, parce qu'on met des petits points d’accès qui sont très peu puissants, chaque fois que vous vous déplacez de quelques mètres, vous allez changer de point d’accès. Et on va vous tracer grâce à ça dans le magasin. Donc il y a plein d’éléments qui shttps://www.django.fm/ont aussi dans notre quotidien auxquels il faut penser. L’éducation c’est vraiment l’élément clef. Et le problème c’est que voilà, comme le politique, lui, n’est pas éduqué, il est difficile qu’il comprenne le besoin en éducation. Vous voyez ce que je veux dire ? Je n’ai pas la langue de bois, donc je suis désolé. Je ne suis pas politique non plus, donc je peux le dire !

Fabien : Ce n’est pas très réjouissant ce que vous nous dites là, Stéphane Koch. Comment est-ce qu’on peut faire, concrètement, pour ne pas se faire pister, ne pas se faire tracer, que ce soit dans les centres commerciaux, dans les magasins, les cartes de fidélité, ou sur Facebook, comme on en parle aujourd’hui ?

Stéphane Koch : Comme je l’ai dit avant, il y a quand même plein d’acteurs, autour, qui essayent de faire un travail de vulgarisation ; qui essayent de mettre à disposition ou de combler le vide qui est laissé par le politique, par l’instruction publique à un certain niveau. Je parle de l’autorité politique, pas des enseignants ni des directeurs d’école qui essayent de faire ce qu’ils peuvent. Comme Cédric vulgarise à travers son site ou informe ou amène des alertes, moi j’essaye de le faire à travers des fois mon compte YouTube où je vais faire des petits tutos, donc des petits guides pour, justement, comment gérer les données d’application, des choses comme ça sur Facebook et on n’est pas seuls : il y a plein de gens qui vont donner de leurs temps, faire des choses comme ça, pour, de nouveau, créer ce trait d’union.

Fabien : Mais encore faut-il que les gens aillent chercher et que les gens fassent le pas de le faire !

Stéphane Koch : Voilà ! J’entends ! On ne peut pas toujours être le chien de Pavlov. Il faudrait des fois un petit peu se réveiller ! On a une responsabilité. C’est important pour les futures générations parce que soit on est contrôlé par nos données, soit on prend le contrôle sur les données. Ça sera un choix qui est un choix stratégique de société ; un choix stratégique de citoyen, de liberté.

Fabien : Voilà, la liberté c’est une question qui est passablement vaste. On a commencé à aborder un petit peu ce soir cette question-là suite au « scandale » Delete Facebook, scandale entre guillemets, qui est l’action actuellement en cours pour se retirer de Facebook, mais les données personnelles, on l’a compris, c’est toujours délicat et le conseil qu’on peut vous donner ce soir c’est d’aller investir quelques minutes pour vos conditions personnelles, vos conditions de partage. C’est en tout votre conseil Stéphane Koch. Merci beaucoup.

Stéphane Koch : Merci à vous.

Fabien : Une très bonne soirée à vous. Je rappelle que vous êtes consultant en stratégie numérique et en réseaux sociaux. Également merci à vous, Cédric Jeanneret.

Cédric Jeanneret : Mais de rien.

Fabien : Une très bonne soirée. Vous êtes militant pour les droits numériques et fondateur du site internet www.ethack.org. Une bonne soirée à vous.

Cédric Jeanneret : Bonne soirée.

Fabien : Et merci à Claudia pour la préparation de ce sujet.

Claudia : Merci et au revoir. Bonne soirée.

Fabien : Un sujet que vous pouvez retrouver sur notre site www.django.fm.

[22 min 30, fin de la partie de l'émission concernant la protection des données personnelles]