Microsoft favorisée à l'Éducation nationale ? Anticor saisit le parquet national financier

Par un communiqué daté du 12 mai 2022, Anticor nous informe qu'elle a déposé une plainte auprès du parquet national financier, portant sur des soupçons de favoritisme dans l’attribution d’un marché public de l’Éducation nationale à l’entreprise américaine Microsoft. Une excellente nouvelle. L'April salue sans réserve cette action de l'association de lutte contre la corruption et pour le rétablissement de l’éthique en politique.

Comme le rappelle Anticor, en septembre 2020 l’hebdomadaire Le Canard enchaîné pointe un appel d’offres d’un montant de 8,3 millions d’euros lancé par les Ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur. Ce marché public de fournitures et de services a pour objet l’équipement de 800 000 postes dépendant de licences Microsoft. La sénatrice Marie-Noëlle Lienemann avait d'ailleurs déposé, suite à cette information, deux questions écrites, une au ministre de l'Éducation Nationale et une à la ministre de l'Enseignement supérieur1. Dans sa réponse, le ministère de l'Éducation semble surtout justifier sa propre dépendance à l'éditeur.

L'association de lutte contre la corruption a fait le choix de ne pas publier sa plainte. Elle précise toutefois son analyse ; en nommant explicitement les solutions de l'entreprise américaine et en excluant toute alternative, il y a une atteinte à la liberté d'accès et l'égalité des candidats au marché public, ce qui constitue une infraction pénale dès lors qu'une personne dépositaire de l'autorité publique procure ou tente de procurer un avantage injustifié à un candidat2. Le communiqué d'Anticor vise également l'article L123-4-1 du Code de l'Éducation qui impose, dans l'enseignement supérieur, un usage prioritaire des logiciels libres.

Historiquement, l'April a dénoncé très tôt la dépendance de l'État à Microsoft, particulièrement celle de son ministère des Armées qui est lié à l'entreprise depuis 2007 par des accords Open Bar successifs, entretenant sa propre dépendance3. Les conditions de passation du contrat initial, opaques, laissant même envisager un vraisemblable délit de favoritisme 4. Concernant la situation de l'Éducation nationale, l'April a alerté aussi en 2015 sur un partenariat indigne des valeurs affichées par le ministère.

Aucun plan d'action5 ni aucune déclaration politique 6 ne suffiront à renverser les rapports de force et à libérer les administrations de l'emprise de la multinationale américaine. Une enquête judiciaire pourrait grandement aider à entamer, sérieusement, la nécessaire cure de désintoxication.