Les débats ne font que commencer autour de la priorité au logiciel libre dans la loi

Paris, le 14 janvier 2016, communiqué de presse.

Dans le cadre de l'examen du projet de loi « pour une République numérique », le 13 janvier 2016, les députés de la commission des lois ont voté en faveur d'un amendement qui « encourage à l'utilisation de logiciels libres » dans le secteur public tout en reconnaissant que sa rédaction n'est pas satisfaisante. Cependant, le débat sur la priorité au logiciel libre n'est pas terminé et devrait se poursuivre en séance publique. L'April appelle de nouveau les parlementaires à ne pas se laisser berner par les contre-vérités du gouvernement et à introduire et conserver la priorité au logiciel libre dans le secteur public, condition indispensable pour une informatique loyale au service de l'intérêt général.

En commission des lois, plusieurs amendements proposaient de donner la priorité aux logiciels libres dans le secteur public : l'amendement CL412 et CL408. Un amendement présenté comme amendement de repli, le CL393 proposait simplement d'encourager l'utilisation des logiciels libres. La députée Delphine Batho, qui présentait l'amendement CL393, a expliqué qu'elle soutenait d'abord les amendements CL408 et CL412, mais qu'il n'y avait aucune chance qu'ils soient adoptés parce, selon elle, pour la Direction des Affaires Juridiques du Ministère des Finances et des Comptes Publics il impossible de mettre la priorité au logiciel libre dans la loi.

De son côté, Madame la Ministre Axelle Lemaire a affirmé qu'il existait un « risque constitutionnel » à donner la priorité au logiciel libre. On se croirait de retour en 2013, à l'occasion des débats sur la loi pour refondation de l'École de la République. Le ministère de l''Éducation de l'époque avez indiqué qu'inscrire la priorité au logiciel libre dans la loi poserait des « difficultés juridiques » et le rapporteur avait ajouté qu'« une telle disposition serait en contradiction avec le droit européen de la concurrence ».

Nous avions écrit au ministre pour lui demander la communication de l'analyse juridique. Nous n'avions reçu aucune réponse et l'amendement priorité au logiciel libre dans le service public de l'Enseignement supérieur avait été voté, contre l'avis du gouvernement. Le Conseil National du Numérique explique dans une fiche synthétique qu'une priorité au logiciel libre ne remet pas en cause un principe de "neutralité technologique" de l'achat public et que cela ne porte pas atteinte aux règles de concurrence de l'Union européenne.

Nous demandons au gouvernement la publication de la note juridique de la Direction des affaires juridiques (DAJ) du Ministère des Finances et des comptes publics, de manière à ce que le gouvernement cesse d'utiliser un argument d'autorité.

L'amendement CL393 a finalement été adopté, même si le mot « encourager » a « une valeur juridique que nous savons faible, on peut dire c'est un euphémisme » comme l'a souligné le député Patrice Martin-Lalande.

La députée Isabelle Attard a fait d'utiles rappels sur le logiciel libre pour répondre aux arguments du gouvernement. Nous vous invitons à visionner l'ensemble des échanges (sélectionner « Après l'article 9 ») ou à lire la transcription.

Les députés porteurs des amendements ont d'ores et déjà annoncé que le débat se poursuivra lors de la séance publique et que les amendements « priorité au logiciel libre » seront redéposés pour la séance dans l'hémicycle. Les débats commenceront lundi 19 janvier 2016.