La CJUE consacre les racketiciels au mépris des droits des consommateurs européens

Paris, le 9 septembre 2016, communiqué de presse.

La Cour de justice de l'Union européenne, dans un arrêt publié le 7 septembre 2016, scelle en Europe la vente forcée ordinateur/logiciels au lieu de protéger les consommateurs et renvoie aux juridictions nationales le soin de trancher les litiges au cas par cas.

Le jeudi 25 juin 2015, la Cour de cassation avait posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne sur la vente forcée ordinateur/logiciels. Dans le cas d'espèce, un consommateur désireux d'acquérir un ordinateur Sony d'un modèle particulier, n'a pu le faire sans acheter le système d'exploitation et plusieurs logiciels pré-installés sur la machine. Il a donc exigé le remboursement de ces logiciels devant le tribunal : remboursement refusé en appel.

La Cour de cassation ne s'était pas prononcée sur le fond, mais avait considéré qu'il s'agit là d'une vraie question de droit qui doit être traitée par les juridictions européennes afin que la directive 2005/29 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs s'applique de la même manière dans toute l'Union européenne.

Les questions auxquelles la Cour de Justice européenne avait à répondre sont les suivantes :

1°) les articles 5 et 7 de la directive 2005/29 du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur doivent-ils être interprétés en ce sens que constitue une pratique commerciale déloyale trompeuse l’offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés lorsque le fabricant de l’ordinateur a fourni, par l’intermédiaire de son revendeur, des informations sur chacun des logiciels préinstallés, mais n’a pas précisé le coût de chacun de ces éléments ?

2°) l’article 5 de la directive 2005/29 doit-il être interprété en ce sens que constitue une pratique commerciale déloyale l’offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, lorsque le fabricant ne laisse pas d’autre choix au consommateur que celui d’accepter ces logiciels ou d’obtenir la révocation de la vente ?

3°) l’article 5 de la directive 2005/29 doit-il être interprété en ce sens que constitue une pratique commerciale déloyale l’offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés, lorsque le consommateur se trouve dans l’impossibilité de se procurer auprès du même fabricant un ordinateur non équipé de logiciels ?

La Cour de Justice européenne a rendu son arrêt ce mercredi 7 septembre 2016 (le communiqué de presse de la CJUE et l'arrêt de la CJUE). Dans son arrêt, la CJUE considère que la vente forcée ordinateur/logiciels ne constitue pas, en tant que telle, une pratique commerciale déloyale et elle renvoie aux juridictions nationales le soin de trancher les litiges au cas par cas. Une analyse a été publiée sur Next INpact. L'argumentaire de la CJUE montre une incompréhension de la nature de la vente d'ordinateurs préinstallés avec des logiciels.

Selon l'arrêt, les gouvernements français, belge et tchèque ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations. Pour des raisons de transparence, l'April demande la publication de ces observations.

Dans le passé la Commission européenne a condamné Microsoft à des amendes pour abus de position dominante sans que cela ait un quelconque effet pour mettre un terme à ses pratiques déloyales. Aujourdhui, dans une décision incroyable, la CJUE entérine la pratique de la vente forcée ordinateur/logiciels au mépris de la liberté de choix des consommateurs et de la liberté de sélectionner en parfaite connaissance l'offre la plus adéquate à leurs besoins. Cet arrêt permet ainsi à l'entreprise américaine d'asseoir davantage son quasi-monopole.