Google esquive la redevance à la presse - Décryptualité du 30 septembre 2019

Pile of Euro Notes

Titre : Décryptualité du 30 septembre 2019 - Google esquive la redevance à la presse
Intervenant·e·s : Nolwenn - Magali- Nicolas - Manu - Luc
Lieu : April - Studio d'enregistrement
Date : 30 septembre 2019
Durée : 15 min
Écouter ou télécharger le podcast
Revue de presse pour la semaine 39 de l'année 2019
Licence de la transcription : Verbatim
Illustration : Pile of Euro Notes - Licence Creative Commons BY 2.0
NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Description

Le ministre de la Culture et la presse sont ulcérés par l'annonce de Google de modifier leur service de nouvelles afin de ne pas payer la redevance qui leur était destinée. Retour sur une conclusion prévisible.

Transcription

Luc : Décryptualité.

Voix off de Nico : Le podcast qui décrypte l’actualité des libertés numériques.

Luc : Semaine 39. Salut Manu.

Manu : Salut Mag.

Mag : Salut Nolwenn.

Nolwenn : Salut Nico.

Nico : Salut Luc.

Luc : Nous sommes au complet, ça fait plaisir.

Manu : Oui.

Luc : Qu’as-tu dans la revue de presse cette semaine mon bon Manu ?

Manu : Une bonne grosse revue de presse cette semaine.

Mag : Elle est énorme ! Bref ! Joinup, « France’s Gendarmerie:Freedom of choice is priceless », de monsieur Hillenius.

Manu : Tu n’as pas donné son prénom.

Mag : Toi non plus d’ailleurs.

Luc : Il est imprononçable. De quoi ça parle ?

Manu : Ça parle d’émissions et de discussions sur la Gendarmerie qui reprennent et qui discutent notamment de ce que l’April a comme combat, avec la Gendarmerie, pour mettre en avant les logiciels libres. Ça marche assez bien dans ce genre d’administration en France et ça fait plaisir

Mag : Et l’article est en anglais. Developpez.com, « Le Sénat inscrit l'obsolescence programmée logicielle dans le projet de loi pour une économie circulaire », de Michael Guilloux.

Manu : Ce n’est qu’un projet de loi. Il y a des amendements qui ont été mis en avant, notamment par des sénateurs communistes, et il y a des choses intéressantes qui parlent de logiciel libre, qui mettent en avant le logiciel libre et qui sont soutenues par l’April. C’est assez sympa.

Nolwenn : On va enfin pouvoir utiliser nos imprimantes plus de cinq ans ?

Manu : Potentiellement. Il faudra voir, il faudra discuter avec les vendeurs de l’encre des imprimantes qui sont un des problèmes.

Mag : Alternatives-economiques, « L'économie circulaire ne tourne pas rond », par la rédaction.

Manu : Ça parle globalement de biens communs qui sont en train d’évoluer et d’arriver un petit peu plus dans l’économie. Une discussion un peu critique, mais le sujet des biens communs est vraiment important. Piketty, notamment, le met en avant dans son dernier livre.

Mag : L'OBS, « Google n’entend pas donner un sou aux éditeurs de presse », par Thierry Noisette.

Manu : Ce sera le sujet dont on va parler juste après.

Luc : Oui.

Mag : Next INpact, « L'Arcom, fusion de la Hadopi et du CSA », par Marc Rees.

Manu : Une nouvelle institution qu’on aime déjà détester parce que, vraisemblablement, ils vont faire des choses sur Internet qui correspondront à de la censure ou ils vont même débrancher des connexions Internet pour certains. A priori on va les suivre et on ne va pas les suivre de manière aimable, il y a des chances.

Mag : Notre temps, « L'association Framasoft souhaite arrêter ses services alternatifs à Google », par la rédaction.

Luc : Bouh !

Manu : Framasoft ce sont des amis, qu’on aime beaucoup, des gens hyperactifs qui ont mis en place une quantité phénoménale de services libres basés sur du logiciel libre. Eh bien là, il faut croire qu’ils mettent un petit peu en avant le fait de ne pas centraliser tous ces services, ça faisait partie des grandes discussions. Ils veulent que ce soient les chatons qui reprennent ces services à leur charge et que eux se mettent un petit peu plus en arrière.

Nolwenn : Ça n’a pas jamais été vraiment une surprise. Ça faisait déjà partie de leur campagne de Dégooglisation, dès le départ.

Manu : Ça date de ?

Mag : Ça date de 2014, effectivement ça devait durer trois ans. Logiquement, en 2017, on aurait dû commencer à arrêter. Là, quand on dit qu’on souhaite arrêter nos services, on ne va pas tous les arrêter du jour au lendemain, sans suivi. On commence à le dire maintenant et il y a des projets qui vont s’arrêter maintenant genre Framabee ; il y en a d’autres qui s’arrêteront en 2022 et il y en d’autres qui ne s’arrêteront pas.

Manu : En tout cas ce sont des gens formidables qui font un travail énorme, donc je peux comprendre qu’à un moment donné il faut transmettre le flambeau, il faut s’assurer que ce soit décentralisé et que tout le monde y participe.

Mag : Vive les chatons ! Nextgen-Auto.com, « Mercedes favorable à l'arrivée de pièces partagées en open source », par Olivier Ferret.

Manu : Un sujet original. Les Formules 1 sont dans de grandes discussions entre les différentes écuries parce que les pièces sont sujettes à des règlements très compliqués à mettre en place. Il y a des discussions sur la standardisation de ces pièces et des plans qui vont avec. Ou, c’est une autre alternative qui est en train d’être étudiée, de les rendre open source, c’est-à-dire de s’assurer que les plans soient partagés, soient constitués en communs entre les différentes équipes. Je pense que ce n’est pas encore figé, ce sont plutôt des discussions, mais c’est quelque chose d’assez original.

Mag : LeMagIT, « Open source : l'Anssi poursuit sa politique d'ouverture », par Valéry Marchive.

Manu : L’ANSSI est une autre institution — celle-ci on l’aime beaucoup — qui parle beaucoup de sécurité et de logiciel libre. Ils ont des projets en interne qui sont en train de sortir et qui sont du Libre. C’est à ce sujet-là que l’article est sorti. On rappelle qu’il y a des bonnes choses dans les institutions françaises, entre autres.

Mag : France Inter, « Ada Lovelace, pionnière de l'informatique dont le corps médical a anesthésié les talents », par Baptiste Beaulieu.

Manu : Techniquement l’article ne met pas en avant le logiciel libre ou l’open source, mais il parle de la créatrice de l’informatique, quelqu’un dont on a régulièrement parlé, Ada Lovelace, la première informaticienne, le premier informaticien.

Luc : Avant les ordinateurs.

Manu : Avant les ordinateurs, justement, c’est dire à quel point elle est remarquable et remarquée, mais, et c’est ce que la chronique remonte, elle a eu beaucoup de difficultés à son époque pour exister et pour arriver à développer son génie. Donc il faut le noter et la mettre en avant.

Mag : D’ailleurs, je tiens à faire remarquer le livre de Catherine Dufour Ada ou la beauté des nombres, une biographie sur cette femme-là et l’April recevra Catherine le 5 novembre dans son émission Libre à vous !.

Luc : Merci. Le sujet du jour c’est cette question de gros sous, ça découle d’une loi. Est-ce qu’on peut faire un petit rappel là-dessus, on en avait beaucoup parlé dans Décryptualité.

Nico : C’est une loi qui est passée l’été dernier, je crois.

Manu : Un règlement européen. Une directive.

Nico : Une directive sur les droits d’auteurs, les droits voisins et droit de la presse. Le but c’était de se remettre autour de la table avec tous ceux qui étaient concernés par ça : les éditeurs, les écrivains, la presse, les plateformes, en particulier YouTube, Google et autres.

Manu : Donc les GAFAM.

Nico : Les GAFAM en général et discuter pour voir comment on pouvait se partager un peu mieux les parts du gâteau parce que les éditeurs avaient l’impression que les GAFAM leur piquaient tous le morceau.

Luc : Oui et c’était les fameux articles, combien ? 11 et 13 ?

Manu : À l’origine c’était les articles 11 et 13.

Luc : Il y a eu beaucoup de mobilisation sur Internet puisque les GAFAM n’étaient pas trop pour et un certain nombre de gens, notamment des youtubeurs, s’étaient mobilisés contre ça.

Nolwenn : Ce soir on parle surtout de l’article 11, qui est maintenant l’article 15, et pas de l’article 13 qui, lui, concerne uniquement YouTube, l’article 13 qui est maintenant l’article 17.

Mag : Ça devient compliqué là !

Nolwenn : Ça s’appelle des lois !

Luc : Ça s’appelait 11 et 13 et maintenant c’est passé à 15 et 17. Effectivement on a une partie qui touche YouTube sur laquelle on n’a pas de nouvelles pour l’instant. Pas de nouvelles bonnes nouvelles ? Non ! Oui ! Ça ne marche pas ! Par contre c'est sur la partie presse. C’était quoi l’objectif de ce truc-là ?

Nico : Les éditeurs en avaient marre que Google leur bouffe toutes leurs parts de gâteau et ne reverse rien. Du coup, Google absorbait du trafic des utilisateurs, quand on faisait des recherches affichait des titres de presse avec le petit descriptif et la photo. Google plaçait bien entendu sa pub au passage sur les pages, les utilisateurs étaient après redirigés vers le site du journal en question et les éditeurs trouvaient que ce n’était pas juste que Google se goinfre grâce à ça sans jamais rien leur reverser et ils ont demandé à ce qu’il y ait un partage du gâteau.

Manu : En gros, c’est un service de Google qui s’appelle Google Actualités qui fait ça, qui récupère et qui met en avant ces articles de presse, effectivement le résumé, la vignette. C’était le gros débat et tous les journaux, tous les médias officiels ont défendu, j’ai l’impression en tout cas, cet article 15 et ont défendu les ayants droit face aux GAFAM en disant que les GAFAM étaient vraiment des voleurs, on en était quasiment là. Les éditorialistes ont défendu cette directive et tout le monde, on dirait, en Europe a défendu à l’encontre des GAFAM, les éditeurs.

Luc : Du côté des médias.

Nico : Voilà.

Manu : Oui, c’est bien ce dont je parle.

Luc : À l’inverse, il y a d’autres gens qui ont critiqué ce système-là, notamment ça posait un problème et il y a une exception sur la question du lien. Google en faisant ça — il y a une image, il y a le chapô de l’article, etc. —, mais il y a un moment où ils ont dit : « Il faut faire payer tous les liens ». Donc on s’est retrouvé dans des situations où on s’est dit « dès lors qu’il y a un lien sur un site, on va devoir se retrouver à devoir cracher pour le simple privilège de pouvoir faire un lien vers un article. »

Nolwenn : Donc tous ceux qui ont des lecteurs de flux RSS aussi ?

Nico : Ça aurait le bordel en fait ce truc-là. Il y a eu des exceptions. La loi aujourd’hui, telle qu’elle a été rédigée, dit qu’à partir du moment où on reprend un contenu un peu précis avec plus que le titre, plus que juste les quelques mots du titre, donc à partir du moment où on prend un chapô, une image ou un bout de texte plus spécifique, dans ce cas on doit reverser une contribution. Les modalités restaient à définir et c’était censé amener Google autour de la table pour se mettre d’accord sur les montants et la répartition.

Manu : C’était à négocier.

Nico : C’était à négocier. On savait que c’était obligatoire mais à négocier. Et Google a dit : « Eh bien non, désolé, la loi que vous avez votée, vous allez voir asseoir dessus. »

Manu : Non.

Nico : On a trouvé la faille !

Manu : Non, non, non !

Luc : Si, parce que c’est exactement ce que dit tout le monde, le ministre, la presse, tout le monde dit que Google ne respecte pas la loi.

Mag : Si, si Google respecte la loi. Il met le titre et le lien. Du coup, on n’a plus le chapô, on n’a plus le descriptif et du coup on a moins envie d’y aller, quoi !

Luc : Potentiellement oui, en tout cas ça tombe dans l’exception qui a été votée qui est la loi, qui est de dire « on a le droit de faire un simple lien ». Du coup, il y a plein de gens qui sont des menteurs qui disent que Google ne respecte pas la loi ?

Manu : Oui. Ça me fait mal au cœur de les défendre, mais, pour le coup, Google dans ses annonces, annonce qu’ils vont juste strictement appliquer la loi ; ils ne vont pas négocier, pour l’instant en tout cas, quoi que ce soit, ils ne vont pas encourir les foudres de quelque institution qui soit, ils vont juste appliquer ! Et ça ce n’est pas une faille ; c’est l’application du droit, c’est que tout le monde doit faire.

Nolwenn : C’est le retour des titres pièges à clics. C’est ça ?

Nico : Ça va être marrant ! Là où Google est malin, la loi ne les arrangerait pas du coup ils ont fait leur propre loi.

Mag : Non !

Nico : Si en passant par le droit privé. C’est-à-dire qu’ils ont aux éditeurs : « Si vous voulez qu’on rajoute l’image et le chapô, vous passez un contrat avec nous qui nous cède tous vos droits et dans lequel on ne paiera pas et dans ce cas on réactivera les liens et les chapôs. Du coup c’est un contrat entre nous et vous et plus du tout la loi européenne.

Luc : Il y a une chose qui est certaine, c’est que tous les gens qui disent, et ils sont nombreux, qu’ils ne respectent pas la loi sont des menteurs !

Mag : Ou des gens mal informés.

Luc : Oui ! Quand tu es ministre, quand tu es gros lobbyiste de la presse, tu es quand même censé connaître la loi.

Mag : Quand tu es ministre tu n’es pas censé connaître des choses ! On le sait, on l’a vu plusieurs fois ! Et quand tu es un gros lobby de la presse, tu n’es pas censé dire la vérité chaque fois que tu parles à la presse.

Luc : Donc ce sont des menteurs ! D’autant plus que notre ministre c’est quand même Frank Riester qui connaît très bien le sujet.

Mag : Il n’était pas à la Hadopi, lui avant ?

Nico : Si, c’est un des fondateurs de la Hadopi.

Luc : Donc c’est très rigolo et tous ces gens sont très surpris en disant « pourquoi, pourquoi ? »

Manu : Pour le coup on peut parler de l’histoire parce que la surprise est amusante à remettre dans son contexte. Il y a eu déjà un passif en Espagne et en Allemagne. En Espagne ils ont déjà passé ce genre de loi il y a quelque temps et vous vous rappelez ce qui s’était passé ?

Nico : Google les avait fait sauter aussi, ils avaient tout viré.

Manu : C’est-à-dire ?

Luc : Ils n’avaient pas juste fait un lien, ils avaient dit : « On efface tout. »

Manu : Ils avaient arrête leur service Google Actualités. Et en Allemagne, plus récemment ?

Nico : Pareil, déréférencement, je crois que c’était quelque chose qui était assez proche du lien du droit européen avec justement juste le lien et le titre, et pareil, les éditeurs ont vu 80 % de leur trafic disparaître du jour au lendemain.

Mag : Donc en gros il n’y a aucune surprise. Ils avaient déjà fait ça, je ne vois pas pourquoi ils ne l’auraient pas refait en France.

Luc : Il y a d’autant moins de surprise qu’on l’avait dit !

[Rires]

Manu : Ce n’est pas bien ! Ce n’est pas bien !

Luc : On en a beaucoup parlé parce qu’il y avait beaucoup de débats à l’époque. J’adore dire « on vous l’avait bien dit » et ici, à Décryptualité, on avait dit « ils vont utiliser ce processus ou n’importe lequel » parce qu’on était encore en cours de discussion à l’époque, donc on ne savait pas encore quelle serait la loi. Mais d’une façon ou d’autre, dès lors que ce sont eux qui ont la main sur le robinet, ils donnent la forme qu’ils veulent à l’information, ils trouveront toujours une façon de se dépatouiller parce qu’ils sont en position de force au final.

Manu : Donc là, en gros, c’est mon opinion, c’est que ceux qui pont poussé la loi se sont aveuglés ; ils ont cru que comme c’était l’Europe qui passait une directive qui protégeait leurs droits, en tout ça c’est ce qu’ils pensaient, ils se disaient que Google et Google Actualités ne pourrait s’arrêter parce que l’Europe c’est trop gros, c’est un marché énorme et ils ne pourraient pas arrêter de fonctionner dans ce marché comme ils fonctionnaient avant.

Mag : Naïfs !

Manu : C’est un aveuglement et cet aveuglement transparaît aujourd’hui et les gars se disent « Google a menti, il n’applique pas la loi. » J’ai aussi entendu « il n’applique pas l’esprit de la loi. » Peut-être qu’il n’applique pas le soi-disant esprit de la loi, mais il applique la lettre de la loi, ce qui est suffisant.

Nolwenn : Je n’y connais pas grand-chose en juridique, mais c’est quoi « l’esprit de la loi » ?

Manu : Pour ceux qui se plaignent, vraisemblablement c’est « donnez-moi de l’argent ».

Luc : C’est l’objectif qu’on avait.

Nico : C’est vrai qu’après c’est une partie de ping-pong. Les éditeurs vont dire que c’est Google qui leur pique du chiffre d’affaires. Google dit l’inverse. Google dit : « Si on n’était pas là vous n’auriez pas de trafic », chacun se renvoie la balle et personne ne sait qui doit de l’argent à qui. Il y a des fois des postures un peu bizarres : par exemple les agences de presse disent : « Regardez, nous on a des pigistes et autres, on écrit du contenu et c’est nous qui devrions être payées ».

Manu : Et elles considèrent qu’elles sont volées par les GAFAM.

Nico : Elles considèrent qu’elles sont volées, mais, de l’autre côté, la R&D que fait Google et les développeurs qui sont payés, etc., eh bien les éditeurs ne participent pas non plus à ce morceau-là.

Mag : Il y a quelque chose qui pourrait s’avoisiner à notre cas, ce sont les Pages jaunes. Si vous vous rappelez il y a quelques années, Les Pages jaunes c’était un gros bottin et les commerçants devaient payer pour apparaître dans les Pages jaunes. Là, ce qu’on voit, c’est Google qui se prend pour les Pages jaunes et qui veut faire payer les commerçants ou les sites ou les éditeurs de presse pour apparaître.

Luc : Ils ne veulent pas les faire payer.

Manu : Ils sont plus généreux que ça !

Luc : Ils sont prêts à faire le truc gratuitement. De fait, au tout début, Internet c’était ça : quand les premiers moteurs de recherche étaient étaient français, qu’ils étaient tenus par France Telécom à l’époque, effectivement quand on voulait être dedans il fallait payer. C’était un business bien rentable.
Je ne suis pas d’accord avec toi Manu quand tu dis qu’ils se sont bercés d’illusions. Moi je pense qu’ils savaient que ça allait leur péter à la gueule.

Manu : C’est-à-dire les lobbyistes qui ont mis en avant ce nouveau droit ?

Luc : Ils savaient que ça ne marcherait pas et, à mon avis, je pense qu’ils devaient avoir un truc du genre « légalement on a cette ouverture parce que c’est ce que l’Europe à dit, donc on va le faire parce que c’est le seul truc qu’on puisse faire maintenant, on sait que ça ne va pas marcher et on va faire un maximum de cinéma pour demander quelque chose de plus contraignant ». Je pense que c’est leur stratégie. J’ai fanfaronné en disant qu’on l’avait bien, mais on n’est pas les seuls. À peu près tous les gens qui s’intéressent au sujet avaient dit : « Ça ne marchera pas, ça ne marchera jamais. »

Nico : En gros, en dehors de Google et des éditeurs tout le monde disait bien que ça allait faire finir comme ça, c’était assez clair.

Manu : On avait vu des conférences et des discussions et des débats où effectivement, en gros ce qui en sortait, c’est que, si on l’appliquait tel quel, ça allait donner encore plus de pouvoir aux GAFAM. Les GAFAM sont la porte d’entrée d’Internet et la porte d’entrée des contenus et une fois qu’on est la porte d’entrée, eh bien on contrôle le flux et on a le pouvoir. Et là, en forçant une négociation, on aurait donné encore plus de pouvoir, on l’aurait institutionnalisé, on l’aurait encore plus gravé dans le marbre et les GAFAM seraient devenus les contrôleurs officiels d’Internet. Donc, à la limite, c’est presque inespéré de voir que Google ne veut pas endosser ce costume-là, mais ça me fait mal au cœur parce que ça n’empêche, ils ont un pouvoir exorbitant, énorme et ça c’est injuste.

Luc : Ce qui est un petit peu malheureux, finalement, c’est qu’on se retrouve dans un combat entre, d’un côté, un GAFAM qu’on n’apprécie pas et, de l’autre côté, des ayants droit qui essayent de fermer le truc, ce qu’on n’apprécie pas non plus. Là-dedans les libertés informatiques sont assez absentes, l’intérêt du public est assez absent aussi. Je trouve ça un peu triste.

Mag : Par contre, maintenant, ça va être amusant d’ouvrir les paris : quels sont les médias qui vont réapparaître ?

Luc : On va s’arrêter là. Merci tout le monde. Je ne serai pas là la semaine prochaine. J’espère que vous arriverez à vous débrouiller sans moi.

Nico : Salut.

Manu : À la semaine prochaine !

Nolwenn : Salut.

Mag : Salut !