Causerie April du 1er octobre 2007: April et les entreprises

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Introduction

Les « Causeries April » sont des interviews ou des discussions organisées régulièrement (avec un objectif d'une par semaine ou quinzaine), d'une durée d'une ou deux heures, sur un sujet donné.

Le lundi 1er octobre 2007 de 17h30 à 19h15, Christophe Le Bars, vice-président entreprises de l'April, était invité pour répondre aux questions des membres de l'April sur le thème « April et les entreprises ».

Pour cette causerie, la modération et l'animation étaient réalisées par Benoît Sibaud.

Introduction du modérateur

Bonjour à toutes et à tous, nous avons le plaisir d'accueillir ce soir pour notre huitième causerie April Christophe Le Bars, vice-président entreprises de l'April, pour répondre à toutes vos questions sur le thème « April et les entreprises ». Pour mémoire, les questions sont à envoyer à causerie@april.org ou en message privé IRC au modérateur.

Compte-rendu de la causerie

Les questions sont en gras.

Bonjour à tous.

Question : Combien y a-t-il d'entreprises adhérentes à l'April ? Quels types d'entreprises adhèrent à l'April ?

April attire toutes sortes d'entreprises qui ont en commun l'envie d'aider à la promotion et à la défense du logiciel libre. Si April compte depuis assez longtemps des membres entreprises, le phénomène s'est développé assez récemment. En septembre 2007, c'est maintenant plus de 60 entreprises et même 1 musée...

Question : Pour quelles raisons ces entreprises adhèrent-elles ? Qu'est-ce qui pousse des entreprises avec des modèles économiques aussi différents à adhérer à l'April ?

Je pense qu'elles ont toutes conscience du rôle éminent que prend aujourd'hui l'April dans la défense de « l'intérêt commun logiciel libre ». Chacune séparément, elles n'ont ni vraiment les moyens, ni même le temps (ce n'est d'ailleurs pas leur objet social) de faire tout ce travail que nous constatons chaque semaine en lisant la lettre interne de l'April : surveillance de la législation, participation à tous les organes divers et variés comme le Forum des Droits sur l'Internet (FDI) dont les positions in-fine peuvent avoir un impact sur le logiciel libre (par exemple sa sécurité juridique) et donc indirectement sur leur activité économique. Le fait qu'elles aient toutes d'une certaine manière cet intérêt commun n'est en rien incompatible avec leurs différences bien visibles du point de vue des modèles économiques.

Question : Quelles sont les activités des entreprises au sein de l'April ?

Au delà du soutien donc au logiciel libre, l'adhésion à l'April est aussi pour une entreprise un moyen idéal pour bénéficier d'une information et d'une veille permanente sur tout ce qui touche le logiciel libre. Régulièrement nous organisons aussi des rencontres dites « personnes morales » qui prolongent le relais quotidien d'information. Enfin le cas échéant quand un besoin spécifique se fait jour, un groupe de travail peut être monté auquel participent tous les volontaires. C'est ce qui s'est fait par exemple pour l'écriture d'un livre blanc sur les modèles économiques. Mais là rien de très différent avec la pratique des autres groupes de travail de l'April.

Question : Quelles sont les relations et modes de fonctionnement entre l'association et ses adhérents entreprises ? Avec les entreprises de manière générale ?

La question ressemble beaucoup à la précédente donc je pourrais faire la même réponse mais pour compléter, il existe aussi une liste de diffusion « personnes morales » qui est le moyen pratique de tisser le lien dont nous parlions...

Question : Est-ce que les petites entreprises ont le même poids que les plus importantes au sein de l'April ?

Je pense que nous pourrions dire cela pour tous les membres, personnes physiques ou morales. Pour l'April, ce qui compte c'est de rassembler le plus grand nombre pour crédibiliser et renforcer nos actions en faveur du logiciel libre. D'un point de vue pratique, il faut juste préciser que chacun contribue à la hauteur de ses moyens et donc qu'il existe un barème de cotisation en fonction du chiffre d'affaires.

Question : Le financement par des entreprises privées n'aliène-t'il pas l'association de son objectif en terme d'indépendance ?

C'est un point que nous devons surveiller de très près en effet. Nous devons garder un équilibre entre toutes nos sources de financement. La diversité est la seule garantie de l'indépendance. Si l'équilibre personnes physiques/morales est respecté et s'il y a beaucoup d'entreprises cotisantes, c'est plutôt donc un renfort pour notre indépendance.

Question : Y a-t-il des entreprises au sein du conseil d'administration de l'April ?

D'un point de vue statutaire, les membres de l'association qui sont des personnes morales ont le droit de vote à l'assemblée générale, mais pas celui d'être éligibles au CA.

Question : L'April est-elle une association professionnelle ?

L'April n'est pas une association professionnelle. Ce type d'association défend les intérêts spécifiques de ses membres alors que l'objet social de l'April est beaucoup plus vaste, il s'agit de la promotion et la défense du logiciel libre. Nos membres ont bien sûr des intérêts partagés avec notre objet social sinon ils ne seraient pas adhérents mais cette coïncidence n'est pas obligatoirement absolue.

Question : L'entreprise Jardin et Loisirs (groupe EMJ) est « la plus grande enseigne française de magasins de motoculture et d'entretien des espaces verts pour particuliers, professionnels et collectivités ». C'est la première société uniquement utilisatrice de logiciels libres à avoir adhéré à l'April. Comment interpréter cette arrivée ?

Je pense qu'il est naturel que les premières entreprises comprenant le besoin des nos activités soient celles dont leur modèle économique laisse une grande place au logiciel libre. Mais les grands utilisateurs de logiciel libres devraient être à mon avis autant concernés que leurs fournisseurs pour nous aider (et donc adhérer et nous soutenir financièrement). Ce serait d'ailleurs une garantie d'indépendance supplémentaire. J'espère donc que cette première adhésion d'entreprise utilisatrice n'est qu'un début.

Question : Tu as fondé une (si ce n'est pas la première) société de service en logiciels libres de France, quels enseignements tires-tu de la spécificité du modèle du libre et en quoi des associations comme l'April viennent s'inscrire dans ce modèle ?

Je pense qu'il faut déjà distinguer le modèle du libre en tant que modèle de licence (et potentiellement de développement) d'une part et les modèles économiques qui gravitent autour de ce nouvel objet qui est le logiciel libre d'autre part. Il y a donc une part de confusion dans la question puisque je ne crois pas que April soit un « modèle économique du libre » bien entendu. April est d'abord une association qui défend et promeut le modèle du libre en tant que modèle de licence.

Question : Lorsque l'on a le statut de travailleur indépendant, on n'est pas une personne morale et ne peut donc pas adhérer à l'April en tant qu'entreprise au sens de SARL, EURL, SA. En fait il n'y a aucune distinction entre la fonction de travailleur en libéral et la personne physique (hormis le droit d'utiliser un nom commercial). Donc d'un point de vue purement juridique, si un travailleur indépendant est adhérent à titre personnel, sa structure est forcément adhérente. Penses-tu qu'il faille préciser le cas de l'artisan du libre au niveau adhésion ?

J'aurais tendance à dire que si la personne morale n'existe pas d'un point de vue juridique, alors elle ne peut pas adhérer mais je ne suis pas juriste :-). Mais l'essentiel à mon avis c'est d'avoir le soutien de cette personne... Et qu'elle soit adhérente quel que soit son statut.

Question : Quand le Livre blanc sur les modèles économiques du logiciel libre rédigé par le groupe de travail entreprises de l'April doit-il paraître ?

Le travail principal de rédaction est maintenant terminé, restent encore quelques relectures, la maquette etc. On espère vraiment que tout soit terminé cet automne.

Question : La société Neuf, adhérente de l'April, a lancé une offre basée sur des dispositifs de contrôle de l'usage (DRM). Que faut-il en penser ? De manière générale comment l'April réagit-elle lorsque des adhérents ont des actions contraires aux positions défendues par l'association ?

D'une certaine manière la contradiction se situe du côté de notre adhérent. De notre point de vue, ce n'est pas un secret, nous combattons les DRM et le fait qu'un adhérent prenne des initiatives ou des positions qui ne recouvrent pas toutes les positions de l'April n'est pas forcément surprenant. Cela peut arriver sur les brevets ou par exemple sur les DRM. Mais cela ne change en rien nos propres positions et nous nous ne privons pas de le souligner directement à notre entreprises membres. Pour ce cas précis, j'espère que leur adhésion pourra être utile pour les faire évoluer, et la bonne question est « comment une entreprise personne morale réagit-elle lorsque l'April a des actions contraires aux positions prises par l'entreprise ? » Enfin il faut rappeler que plus l'entreprise est grande plus, plus les points de vue qui la composent sont divers et contradictoires.

Question : Est-ce que l'April se donne aussi comme mission d'aider à la création d'entreprises autour du logiciel libre ?

Je pense que c'est une question que nous ne nous sommes jamais vraiment posée. D'une certaine manière le livre blanc peut être d'une petite aide :-). Ceci dit, l'aide à la création d'entreprise comprend beaucoup d'éléments extérieurs à notre expertise et que l'on trouve dans d'autres structures. Peut-être qu'un rapprochement avec certaines structures spécialisées, où April serait un soutien sur cette question, pourrait être intéressant. À étudier.

Question : Quelles sont les relations entre la structure en création dite FNILL (« fédération nationale de l'industrie du logiciel libre ») et l'April ?

Je crois que la FNILL répond justement à la définition d'une association professionnelle. C'est assez différent de notre mission. Ceci dit, je ne vois aucune raison de ne pas avoir d'excellentes relations avec celle-ci une fois qu'elle sera créée.

Question : Comment « vendre » une adhésion April à la direction d'une grande (CA>100MEur) entreprise, dont le métier de base n'est pas dans le domaine informatique, mais qui peut être une utilisatrice plus ou moins importante de logiciels libres  ?

Il ne s'agit pas en fait de « vendre » mais simplement d'expliquer l'état des lieux du logiciel libre en France, d'un point de vue juridique, législatif, économique, etc. Cette prise de conscience étant réussie (mais ceci est déjà un énorme travail), il sera naturel d'aider l'April à défendre tous nos acquis communs. Il faut aussi que cette entreprise ait conscience à quel point son outil économique et sa valeur repose sur l'utilisation de logiciel libre. Il faut enfin un type de discours adapté aux dirigeants de ce type de grandes entreprises. C'est un vaste chantier donc.

Question : Merci d'avoir répondu à toutes ces questions. Un dernier mot à ajouter ?

Un petit mot personnel. Étant adhérent de l'April depuis plus de 10 ans (avant d'être au CA) et donc spectateur privilégié, j'aimerais saluer tout le travail accompli par l'association. Plus encore, le travail aujourd'hui des permanents et du reste du CA. Merci aussi à toutes les entreprises (et de manière générale à tous les membres) qui nous soutiennent. Tout ceci n'est pas vain.

La causerie suivante sera consacrée à « Jabber/XMPP », le 10 octobre 2007, avec Nicolas Vérité, membre élu de la XSF (XMPP Standards Foundation) et adhérent April.

Note : merci à Jean-Christophe Becquet, Benjamin Drieu, Olivier Guerrier, Loïc Dayot et David Sapiro pour les questions transmises avant et pendant la causerie.