Publication du décret sur le référentiel général d'accessibilité pour les administrations
Plus de trois ans après la publication de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances , la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, le décret qui doit préciser les modalités d'application de l'accessibilité numérique a été publié au Journal Officiel du 16 mai 2009. Son contenu est loin de correspondre aux besoins et aux attentes du monde du handicap.
On peut consulter le texte du décret « n° 2009-546 du 14 mai 2009 pris en application de l'article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et créant un référentiel d'accessibilité des services de communication publique en ligne » sur le site Legifrance.gouv.fr.
Le portail de la modernisation de l'État annonce la publication du décret : « Le Référentiel Général d'Accessibilité pour les Administrations (RGAA), dont le décret de création n° 2009-546 a été publié au Journal officiel du 16 mai 2009, a pour objectif d’aider les responsables de sites Internet publics à rendre les contenus et les services en ligne plus accessibles aux personnes handicapées. Pour les aider à se mettre en conformité, la direction générale de la modernisation de l'Etat (DGME) s'apprête à publier officiellement le référentiel général d'accessibilité (RGAA) : un outil de mesure et d'accompagnement indispensable pour garantir qu'un site web pourra être vu, lu et compris par tous. ».
L'April, signataire de la pétition pour l'accessibilité numérique des services publics pétition1, considère que le décret est loin de correspondre aux besoins et aux attentes du monde du handicap et qu'il montre un manque de réelle volonté politique et de concertation de la part du gouvernement.
Ainsi le décret reporte un certain nombre de modalités d'application dans le document appelé « Référentiel Général d'Accessibilité pour les Administrations (RGAA) » qui n'est pour le moment pas encore officiel et donc la date de publication est inconnue. Le décret ne fait aucunement référence au respect des recommandations internationales édictées par le W3C (WCAG 2.0) en matière d'accessibilité, alors que celles-ci figuraient dans les certaines versions de travail. Le Forum des Droits sur l'Internet (FDI) dans sa recommandation « Internet et développement durable I: l'accessibilité des services de communication publique en ligne du secteur public » (PDF)2 indiquait recommander « aux rédacteurs du décret d’application de reprendre la « hiérarchie » des documents de référence, énoncée dans l’article 47 de la loi, et de les présenter suivant le même ordre, les recommandations internationales devant apparaître en premier, la méthode d’application venant ensuite, dès lors qu’elle constitue un outil de mise en conformité aux recommandations internationales en vigueur. Afin d’assurer la stricte compatibilité du référentiel d’application proposé par la DGME avec les règles internationales, il est également recommandé de préciser dans le décret d’application que le référentiel d’application « reprend les standards internationaux de l’accessibilité tels que définis par le W3C », et qu’il en constitue la méthode d’application. ». Le site de la modernisation de l'Etat indique que la version officielle du RGAA est en cours de finalisation et devrait être publiée prochainement par voie d'arrêté.
Il est également fort dommage que le décret publié fasse totalement l'impasse sur la formation initiale des futurs webmestres alors que les versions préliminaires du décret indiquait « L’accessibilité fait partie intégrante des enseignements préparant aux professions dont l’objet est la conception, la réalisation de services de communication publique en ligne, la production et l’intégration de contenus desdits services ou l’adaptation des postes de travail ».
Plus grave, le décret ne précise pas les modalités de contrôle de conformité des sites publics et de sanction. Pourtant la mise en oeuvre de sanctions est une demande récurrente des associations du handicap qui considèrent, à juste titre, que c'est la seule manière de contraindre à la mise en conformité des sites publics.
Le décret ainsi exclut toute sanction contraignante en cas de non-conformité. Les sites non conformes seront simplement inscrits sur une liste de services de communication publique en ligne non conformes. Alors même que l'article 47 de la loi 3 impose que le décret précise « les sanctions imposées en cas de non-respect de cette mise en accessibilité .
Le Forum des Droits sur l'Internet (FDI) dans sa recommandation « Internet et développement durable I: l'accessibilité des services de communication publique en ligne du secteur public » écrivait (page 36) « Le Forum des droits sur l’internet recommande aux pouvoirs publics de mettre en place un dispositif de sanctions proportionné aux manquements à l’obligation de nature légale. Les modalités du dispositif de sanction devront figurer de manière expresse dans le décret d’application de la loi, des aménagements d’ordre législatifs pouvant être nécessaires en fonction des solutions retenues. ». Concernant l'inscription sur une liste noire publique des sites non-conformes la recommandation du FDI était claire « Le Forum émet des réserves quant à l’efficacité de cette mesure qu’il ne considère pas comme une sanction à proprement parler, et ce d’autant plus si la liste est longue, et découpée en plusieurs pages. Cette mesure prise de façon isolée ne semble donc pas répondre à la rédaction de l’article 47 qui implique la mise en œuvre de sanctions, et risque de ne pas recevoir un avis favorable du CNCPH ».
La volonté du législateur d'appliquer des sanctions en cas de manquement à l'obligation légale de conformité aux règles d'accessibilité pour les sites internet du service public est donc bafouée par la mise en oeuvre gouvernementale via ce décret.
Le contenu de ce décret n'est-il pas un enterrement de première classe pour l'accessibilité des services publics en ligne, après plusieurs années d'atermoiements ?
- 1. pétition demandant la publication du décret d'application de l'article 47 de la loi de février 2005
- 2.
L'April fait partie depuis mars 2008 du groupe de travail du Forum des Droits sur l'Internet (FDI) consacré au développement durable sur internet dont les travaux ont abordé premier lieu les problématiques d'accessibilité numérique des sites internet. En novembre 2008 le FDI a publié la recommandation « Internet et développement durable I: l'accessibilité des services de communication publique en ligne du secteur public ». Cette recommandation vise à faciliter la mise en oeuvre du décret d'application
- 3.
Les services de communication publique en ligne des services de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent doivent être accessibles aux personnes handicapées.
L'accessibilité des services de communication publique en ligne concerne l'accès à tout type d'information sous forme numérique quels que soient le moyen d'accès, les contenus et le mode de consultation. Les recommandations internationales pour l'accessibilité de l'internet doivent être appliquées pour les services de communication publique en ligne.
Un décret en Conseil d'Etat fixe les règles relatives à l'accessibilité et précise, par référence aux recommandations établies par l'Agence pour le développement de l'administration électronique, la nature des adaptations à mettre en oeuvre ainsi que les délais de mise en conformité des sites existants, qui ne peuvent excéder trois ans, et les sanctions imposées en cas de non-respect de cette mise en accessibilité. Le décret énonce en outre les modalités de formation des personnels intervenant sur les services de communication publique en ligne.